Cet homme devait être ambitieux sur Terre. Contre le gré de son Dieu, il ne devait jamais être invoqué dans un autre monde. Il perds tout du jour au lendemain en étant transporté dans un univers avancé technologiquement. Son désir premier n’est pas de rentrer chez lui. Il doit plutôt affronter des défis de taille dans un monde où politique, business et guerre s’entremêlent, tout en apprenant à maîtriser les nouveaux dons qu’il a acquis dans ce nouvel environnement.
PROLOGUE - TELLUS
Jamais auparavant dans ma vie divine, je n’ai été témoin d’une telle situation. C’est impossible et cela ne devrait jamais s’être produit. Les habitants du monde d’Izanagi ont complètement perturbé l’équilibre de l’univers. Malgré toutes les avancées technologiques et magiques qui ont existé depuis l’aube des temps, ils sont les seuls à avoir réussi à invoquer un être d’un autre monde sans qu’un dieu ne puisse intervenir…
J’ai perdu l’espoir de ma planète à cause d’un accident, et je suis impuissante pour le ramener moi-même. Les règles divines sont absolues et ne peuvent être enfreintes, au risque de provoquer une guerre. Je ne peux pas intervenir et récupérer l’habitant de ma planète, car il fait désormais partie intégrante du monde d’Izanagi.
Il est primordial que Izanagi ne soit pas mis au courant, sinon Alden subira des conséquences terribles.
Pourquoi toi, parmi tous les résidents de la Terre ?
Notre univers est régi de telle manière que chaque monde possède son propre dieu. En tant que déesse de la Terre, je suis Tellus. Malheureusement, mon monde se meurt de plus en plus, et j’ai abandonné sa destinée aux mains de ses habitants pendant des millénaires. Était-ce une décision judicieuse ? Je ne saurai jamais la réponse.
J’avais pourtant pris la décision de faire quelque chose à ce sujet. J’avais l’intention d’initier un changement et j’avais des projets pour certains humains, en commençant par un résident plutôt spécial. Malheureusement, mes plans ont été perturbés par la nature humaine, qui a violé les lois divines.
Alden, je serai toujours à tes côtés, même dans ce nouveau monde.
Je vais devoir mobiliser tous mes pouvoirs pour que tu ne repartes pas les mains vides et pour suspendre mon projet…
CHAPITRE 1 - FOREIGNER
Nous avons tous rêvé de posséder une voiture volante, de vivre dans un monde d’hologrammes ou de réalités virtuelles, voire d’utiliser la magie. Nous voulons être uniques, mais de manière positive, reconnue pour nos actions incroyables. Qui n’a jamais souhaité obtenir un prix Nobel ou sauver des vies dans un incendie ? Même les personnes les plus modestes aspirent à être le centre du monde. Ce désir est humain et peut nous amener à des compétitions inutiles, des rivalités destructrices et des conflits absurdes.
Depuis l’apparition de l’homme sur Terre, nos sentiments personnels nous ont souvent poussés aux actes les plus sombres. Cependant, si nous parvenons à orienter notre désir d’être unique vers des actions positives, nous pourrions accomplir de grandes choses : découvrir des remèdes contre des maladies incurables, construire des maisons pour les sans-abris ou protéger l’environnement pour les générations futures.
Le pouvoir et l’argent ne sont pas les seules sources de conflits et de problèmes, certains humains se prenaient même pour des Dieux dans les temps anciens. En fin de compte, tout dépend de la façon dont nous choisissons de canaliser notre désir d’être uniques.
Je souhaite vous parler de quelque chose d’extraordinaire. Je sens leur présence devant moi : deux déesses non humaines, du moins pas comme moi. Outre les pouvoirs surnaturels qui nous confèrent une supériorité physique, c’est la technologie qui peut faire de nous des êtres divins. Elle nous permet de transcender les lois établies par les Dieux fondateurs eux-mêmes.
Nous pouvons devenir des êtres supérieurs, des futurs Dieux, grâce à cette technologie. C’est cela dont je veux vous parler.
̶ On a vraiment réussi maman.
̶ C’était juste un test pourtant. Je ne savais pas que tester le noyau du télétransporteur pouvait faire ça…
̶ C’est une bêtise, non ?
À genoux, je me retrouvais dans un lieu singulier en présence de deux femmes d’ascendance asiatique. La première, relativement jeune, et la seconde, plus âgée, arboraient toutes deux une blouse de laboratoire blanche ornée d’un symbole que je ne parvenais pas à identifier. Leurs cheveux vert foncé se mariaient harmonieusement avec leurs yeux, et leur voix révélait une beauté qui ne m’échappait pas. Nous étions entourés d’une technologie que je n’avais jamais vue auparavant, excepté dans les films et les séries de science-fiction. Il était évident que je n’étais plus en train de faire mes courses paisiblement. J’avais été transporté, sans que je ne comprenne comment, depuis le supermarché du coin jusqu’à un laboratoire futuriste.
̶ Il est complètement différent de nous, tu crois qu’il parle notre langue maman ?
̶ Appelle moi Présidente Kanegawa quand on est au boulot Midori.
̶ Pardon Présidente.
̶ Cheveux blond et yeux bleus. Première fois que je vois des yeux aussi clairs que de l’eau.
Je parvenais à comprendre ce qu’elles disaient, du moins suffisamment pour réaliser que leur entreprise aurait dû échouer et que la femme plus âgée était la mère de la jeune femme. Étonnamment, elles parlaient en japonais. J’avais un niveau intermédiaire dans cette langue, suffisant pour comprendre et répondre si nécessaire.
J’avais appris cette langue car j’avais l’intention de vivre au Japon à l’avenir. Mais comment étais-je arrivé ici, dans ce laboratoire futuriste, alors que mon pays d’origine était situé à plus de douze mille kilomètres de distance ? C’était impensable.
̶ Il ne nous comprend vraiment pas. Il regarde partout.
C’était légèrement amusant de voir la jeune fille, penser que je ne comprenais pas ce qu’elle disait. J’étais juste en train de réfléchir, si j’étais bien au Japon ou autre part.
̶ Ingénieur Fujimori !
̶ Oui Madame la Présidente !
̶ Créez-moi un traducteur avec un noyau magique ! Trouvez une solution !
̶ Tout de suite Madame la Présidente.
̶ Maman – Madame la Présidente, comment allons-nous traduire sans base de données linguistiques pour cette planète ?
Qu’une seule langue ? Mes soupçons étaient confirmés. J’étais bel et bien dans un monde alternatif à la Terre.
̶ Excusez-moi…
Je me suis mis à parler en japonais. Les mots que j’ai prononcés ont suffi à les faire sursauter et à me regarder avec étonnement.
̶ Pourriez-vous m’expliquer la situation s’il vous plaît ?
Je me suis adressé à la femme plus âgée, car j’ai compris qu’elle était la plus haute gradée.
̶ Il parle vraiment en Yamato, je n’en reviens pas.
̶ Yamato ? Voulez-vous dire le japonais ?
̶ Le japonais ? Qu’est-ce que c’est ?
Ce n’est pas du japonais pour eux ? Pourtant, je le parle et le comprends un minimum.
̶ Pour moi, vous êtes en train de parler une langue de mon monde natal, qui s’appelle le japonais.
̶ Dans votre monde, notre langue existe ?
̶ Oui, mais ce n’est pas le Yamato. Même si je sais ce que ça veut dire.
En réalité, l’utilisation du terme Yamato n’est pas incorrect. Dans mon monde, le pays que nous appelons le Japon a été désigné sous ce nom par un groupe de personnes, et c’est par la suite que les langues étrangères l’ont surnommé ainsi.
Dans l’histoire ancienne du Japon, le peuple majoritaire s’appelait effectivement le peuple Yamato, et leur langue était connue sous le nom de langue Yamato, qui correspond à la langue japonaise actuelle. J’avais lu cela lorsque je m’intéressais à la culture japonaise.
Cependant, étant donné que je me trouve dans un monde alternatif, il est possible que les événements qui ont eu lieu dans mon monde aient divergé à partir du 3ème siècle après Jésus-Christ, ce qui expliquerait pourquoi la planète entière parle japonais. Mais comment cela a-t-il pu se produire reste un mystère.
̶ D’où venez-vous, qui êtes-vous ?
La présidente commençait à me poser des questions sur moi, mais je commençais à avoir un mal de crâne à force de parler une autre langue dont je n’avais plus l’habitude.
̶ Excusez-moi, je n’arrive plus trop à parler votre Yamato. Ce n’est pas ma langue natale après tout.
̶ Je vois, désolé du désagrément. C’est notre faute. Nous allons vous créer une technologie magique de traducteur instantané. Cela vous permettra de parler parfaitement le Yamato.
̶ J’ai rien compris.
̶ Ah.
Elle soupirait de sa méprise à ma compréhension. Mais de mon côté elle m’a perdu à “créer”. C’était trop complexe dans une autre langue.
Je me suis installé confortablement, avec une tasse de thé chaud et des mochis pour me restaurer. Même dans ce monde inconnu, les traditions culinaires restent les mêmes.
Je contemplais attentivement les opérations des chercheurs tout en dégustant ma tasse de thé. J’étais confiné dans une pièce dont l’élément central était une technologie de type téléporteur, similaire à celle observée dans les productions cinématographiques. Cette structure se composait d’un anneau et d’une plateforme circulaire connectée à un générateur volumineux. La lumière de la pièce était artificielle, excluant toute pénétration de rayons solaires. Il est probable que je sois localisé en sous-sol ou en des lieux similaires.
Cependant, plus je vidais ma tasse de thé, plus j’éprouvais une certaine inquiétude. Après tout, je venais juste d’être téléporté dans un endroit totalement inconnu pour moi, sans aucune idée de ce qui allait se passer. Peut-être que même Adam et Eve n’avaient pas existé dans ce monde alternatif.
Étais-je devenu un cobaye malgré moi ? L’avenir était incertain et je n’avais aucune idée de ce qui m’attendait.
̶ C’est fait Présidente !
J’avais compris que le traducteur était terminé. Ça fait au moins 3 heures depuis ma téléportation. Je ne sais pas si c’était rapide ou pas, je ne m’y connais pas en technologie du futur.
̶ Donnez-le-lui afin qu’on puisse parler.
̶ Bonjour Monsieur, je suis l’ingénieur Fujimori. Ceci est un écouteur de traduction automatique. C’est grâce à une pierre magique qui va perm-
̶ Je ne comprends rien.
L’ingénieur, aussi brillant soit-il, s’est retrouvé dans une situation embarrassante. Il avait conçu un dispositif pour que je puisse comprendre sa langue, mais il continuait à me parler dans sa langue de façon encore plus complexe.
̶ C’était très idiot Ingénieur Fujimori.
̶ Désolé Présidente.
Je mettais l’oreillette dans mon oreille droite. J’ai eu un peu mal lorsque je l’ai mise. Comme si je m’étais pris de l’électricité statique dans l’oreille.
̶ Tout va bien ? Vous avez mal quelque part ?
C’est incroyable ! J’arrive à comprendre tout ce qu’ils disent.
En fait, c’est comme si cette langue m’était naturelle, comme si c’était ma langue maternelle. Bien sûr, je suis conscient que ce n’est pas ma langue maternelle, mais cela me semble si fluide. Est-ce ainsi que se sentent les personnes bilingues ?
̶ Tout va très bien maintenant.
̶ Parfait, ça fonctionne ! Donc mainten-
Je me levais de ma chaise. Vu que nous pouvions discuter sans problème et de façon complexe. Je n’allais pas me laisser manger alors qu’on vient de me voler mon monde.
̶ Donc maintenant, vous allez surtout calmer vos ardeurs et me donner des explications à cette situation. Vous n’aurez aucune réponse de moi, tant que vous n’aurez pas répondu à mes propres questions.
Il n’y avait plus aucun bruit dans le laboratoire. Ils étaient tous choqués de mon tempérament, alors que ces trois dernières heures, j’étais poli et calme.
̶ Est-ce que c’est compris ?!
̶ Oui !
Tout le monde affirmait. J’étais content, c’était la première fois que j’avais de l’autorité.
J’avais tellement de questions à poser et je ne savais pas par où commencer.
̶ Qui êtes-vous ?
La mère et la fille se regardaient.
̶ Je vais tout vous dire. Je m’appelle Kanegawa Ayame et voici ma fille Kanegawa Midori. Je suis la présidente de la firme Kanegawa Industries. Toutes les personnes présentes ici, sont mes employés.
̶ J’ai compris que vous vous êtes trompés. Vous n’auriez pas dû m’invoquer ?
̶ Vous invoquez ? C’est le bon terme.
La présidente s’est détournée de moi pour se diriger vers les consoles informatiques derrière elle. Elle a appuyé sur un bouton et soudain, tout a changé. Le noir complet qui nous entourait a été remplacé par une vue spectaculaire depuis le sommet d’une tour gigantesque. Nous n’étions pas dans un sous-sol, mais dans une ville futuriste qui mélangeait la culture japonaise et royaliste. La lumière naturelle qui inondait la pièce mettait en valeur la beauté du paysage. C’était époustouflant.
̶ Bienvenue dans le Royaume d’Himeji ! L’un des plus grands de ce monde et l’un des plus avancés technologiquement parlant.
Je m’avançais des fenêtres et contempler la beauté de cette ville, que je ne pouvais que voir dans les films.
̶ C’est incroyable.
̶ C’est magique n’est-ce pas ?
Midori s’exclama se tenant debout à côté de moi.
̶ Si c’est un Royaume, est-ce que le château est situé là-bas ?
J’étais dans la tour la plus grande de la ville apparemment, mais le château était bien plus haut. Car il était posé en haut d’une colline, surplombant le reste de la ville. Il a dû être construit ici afin de montrer aux citoyens, la grandeur de la royauté.
̶ C’est le Château de la Princesse. La Princesse Miki Kiyomi. Elle dirige le pays.
̶ Elle dirige ? Votre civilisation opte pour une monarchie ?
̶ Ça vous intéresse ?
̶ En effet, je présume que vous n’avez aucun moyen de me faire retourner sur mon monde d’origine. Donc je vais être obligé de vivre ici.
̶ Malheureusement, vous avez tout à fait raison. Votre invocation n’était pas prévue, donc nous n’avons pas du tout créer le nécessaire pour vous renvoyer. Je pense même que cela est impossible.
̶ J’en étais sûr.
En moi, ne subsistait qu’une envie : hurler de toute mes forces. J’avais été enlevé contre ma volonté, abandonnant ainsi ma famille et ma fiancée, sans espoir de retour en arrière. J’étais en colère et très triste.
̶ Pour répondre à votre question. Notre pays est une monarchie absolue. C’est la famille royale qui détient les pleins pouvoirs.
̶ Vous voulez dire que votre princesse détient tous les pouvoirs exécutifs, législatifs et judiciaires ?
̶ Tout à fait c’est le but d’une monarchie. La princesse est considérée comme le chef suprême de l’État et est responsable de la gestion de toutes les affaires du gouvernement.
̶ Cela me semble un peu étrange que tout le pouvoir soit entre les mains d’une seule personne.
̶ Pourquoi il ne pourrait pas l’être ? Cela a toujours été comme ça.
̶ Mais cela ne peut-il pas conduire à des abus de pouvoir et à une concentration excessive du pouvoir entre les mains de la princesse ?
̶ C’est vrai. Cependant, le système fonctionne bien jusqu’à présent et la princesse est considérée comme le gardien de la tradition et de la culture du pays. C’est pourquoi il est important que la monarchie respecte les droits et libertés individuels et que le système judiciaire soit indépendant et équitable.
̶ Vous êtes heureuse ?
Lorsque j’ai posé ma question, elle a semblé prise de court. Il est vrai qu’une question qui surgit de nulle part peut être surprenante. Cependant, après qu’elle m’ait expliqué le système politique de son monde, j’ai pu constater que la qualité d’un pays se mesure au bonheur de ses habitants. J’ai alors regardé autour de moi et j’ai remarqué que tous étaient attentifs et à l’écoute, certains souriaient, d’autres chuchotaient en riant. Personne ne semblait maussade ou abattu, ce qui était bien différent de mon propre monde.
Elle regardait sa fille, qui était à côté de moi, mais à son opposé, vu que j’étais au milieu d’elles.
̶ Très heureuse, en effet.
CHAPITRE 2 - CONTRASTE
Son sourire m’a inspiré une grande confiance, non seulement en moi, mais également en eux. Comment ces gens pourraient ils être mal intentionnés avec une telle joie de vivre ?
Toutefois, malgré cela, je me sentais quelque peu mal à l’aise. Je n’étais pas habitué à tant de bonheur. Je savais que je n’étais pas malheureux, j’ai une famille aimante et une fiancée que j’aime énormément. Cependant, mon monde n’était pas le plus agréable, et surtout à l’heure où je vous parle, mon pays n’était pas bien gouverné. L’état du monde, tel que rapporté quotidiennement dans les médias, avec les guerres, les crises économiques, écologiques et politiques, finissait par te rendre malheureux.
Bien que mon pays soit une République démocratique, où le pouvoir appartient apparemment au peuple, je me rends compte que ce n’était peut-être pas la meilleure chose à faire. Cet univers en est un exemple. Je ruminais beaucoup et réfléchissais excessivement. A quel moment de l’histoire aurait-il fallu agir différemment pour que ce type de système politique émerge ? Quelles décisions auraient dû être prises pour que le monde politique que nous connaissons aujourd’hui prenne forme ?
Dans l’histoire de mon monde que je connais, je sais que le Japon était autrefois divisé en plusieurs petits royaumes rivaux. Cependant, j’ai appris que c’est le royaume de Yamato qui a commencé à prendre de l’importance en devenant une puissance centrale et en absorbant progressivement les autres royaumes. Cette période était marquée par l’émergence d’une influence culturelle importante venant de la Chine et de la Corée, mais il est peu probable que le Japon ait influencé ces pays à cette époque.
En effet, l’Empereur du royaume de Yamato avait consolidé son pouvoir en adoptant des éléments de la culture chinoise.
Je me demande si le Japon a eu une influence suffisamment importante pour avoir tout influencé. Si c’était le cas, il y a de grande chance que le Japon serait sorti du lot. Cependant, je n’ai pas suffisamment d’éléments pour répondre à cette question avec certitude.
̶ Monsieur ?
La Présidente me sortit de mes pensées alors que j’avais l’air perdu. Mon esprit se déconnecte souvent de l’environnement lorsque je réfléchis intensément.
̶ Oui, pardon excusez-moi.
Midori s’approchait de moi en fixant intensément mes yeux.
̶ Vous avez des effets secondaires de l’invocation, vous avez l’air absent ?
̶ Je n’ai rien de particulier, mais je pense que j’ai besoin de repos car j’ai reçu trop d’informations.
Effectivement, du repos ne serait pas de refus. Il faut que je mette un point à ce que je vais faire maintenant. Il risque peut-être de me lâcher en pâture dans leur pays. Comme un citoyen lambda.
̶ Vous avez raison, mais nous allons d’abord vous emmener à l’infirmerie pour vérifier que votre corps n’a pas de problèmes. Nous effectuerons tous les tests nécessaires pour vous rassurer. Ensuite, nous allons préparer une chambre pour que vous puissiez vous reposer.
̶ Merci beaucoup ! Je vais passer mon tour pour la dissection et me contenter de voler en éclats à travers cette baie vitrée !
La Présidente et Midori riaient, ce qui me faisait penser que ce que j’avais dit était ridicule. Pourtant, je suis sûr que tout le monde aurait été effrayé à ma place.
̶ Ne vous inquiétez pas, notre entreprise n’a pas les moyens nécessaires de vous disséquer et puis la baie vitrée est incassable.
̶ VOUS NE ME RASSUREZ PAS ! SI VOUS AVIEZ LES MOYENS, VOUS L’AURIEZ FAIT ?
Elles riaient de plus belle, tandis que moi, j’étais en panique.
Pour me rassurer, Midori posait sa main sur mon épaule.
̶ Je ne sais pas dans quel monde vous vivez, mais je vous promets que nous ne ferons pas ça, croyez moi.
La présidente, commençait à se diriger vers l’autre bout de la salle.
̶ Je vous laisse me suivre, de très près par contre. Je ne vous l’ai pas déjà dit, mais…
Elle s’est arrêtée un instant et m’a regardé de manière étrange, comme si elle avait oublié quelque chose.
̶ J’ai oublié votre nom, c’est quoi déjà ?
̶ IL ETAIT TEMPS QUE VOUS ME LE DEMANDIEZ !
̶ Je ne l’ai pas fait ?
̶ Maman, quand même, c’est impoli…
Je me sentais exaspéré par la situation et j’ai commencé à regarder Midori et devenait légèrement impoli, moi aussi, en commençant à arrêter de la vouvoyez.
̶ Toi aussi tu ne me l’as pas demandé.
Elle me regardait également et semblait amusée par la situation.
̶ J’ai oublié aussi.
Elle a rattrapé sa mère et toutes les deux se sont mises à me regarder. La porte du laboratoire s’est ouverte, réfléchissant une lueur blanche à travers la lucarne. À cause de la grande baie vitrée qui laissait entrer beaucoup de lumière, mes pupilles étaient très dilatées, ce qui rendait difficile l’adaptation à une pièce plus sombre, je ne voyais pas très bien.
À travers cette lueur éblouissante, je pouvais distinguer les deux femmes qui me montraient la sortie.
̶ Venez découvrir avec nous la vaste société qu’est Kanegawa Industries.
Malgré ma colère, j’étais curieux et excité à l’idée de découvrir ce monde. Je me suis approché d’elles pour les suivre, et avec un petit souffle de nez et un léger rictus de la bouche, j’ai finalement dévoilé mon nom.
̶ Appelez moi Alden Rossi.
CHAPITRE 3 - RESULTATS
Alors que nous nous dirigions vers l’infirmerie, nous traversions les couloirs de l’entreprise. La présidente Ayame m’avait révélé quelque chose de choquant qui expliquait pourquoi elle m’avait demandé de rester près d’elle. Nous croisions uniquement des personnes d’origine asiatique, ce qui était normal dans ce monde alternatif du Japon. Cependant, ce qui était inhabituel, c’est qu’il n’y avait pas de personnes à l’apparence caucasienne. D’après la présidente, mon apparence était si unique que les habitants pourraient être choqués en me voyant, soit positivement, soit négativement. Je me demandais ce qui avait pu se passer dans leur histoire pour que tous les habitants soient asiatiques. Cette question me taraudait constamment. En même temps, j’étais également impressionné par l’architecture futuriste de l’établissement dans lequel nous nous trouvions.
Il était évident que l’époque dans laquelle j’étais projeté avait considérablement avancé dans le futur pour pouvoir concevoir une infrastructure aussi raffinée et élégante. Des hologrammes indiquaient les noms des différents secteurs et certaines personnes portaient des bracelets multifonctions qui remplaçaient leurs téléphones. Ces bracelets étaient dotés d’écrans holographiques permettant d’accéder à internet et de participer à des visioconférences. Tout ce qui était disponible sur un téléphone dans mon monde était désormais accessible sur ce bracelet de manière holographique, ce qui était exactement ce que j’avais toujours souhaité. Cependant, j’ai également pu remarquer des défauts notables dans cette technologie.
Malgré les avancées technologiques remarquables, je n’avais pas encore eu l’occasion de rencontrer ce que je désirais le plus : les androïdes. Il me semble qu’ils n’existaient pas dans ce monde, ce qui m’inquiétait grandement compte tenu de son niveau de développement technologique.
̶ Nous y sommes Monsieur Rossi.
Ayame m’escorta jusqu’au cabinet médical de l’entreprise, qui était bien plus qu’une simple infirmerie étant donné que la société employait plus de 10 000 salariés. Il était évident qu’une simple infirmerie ne suffirait pas à couvrir l’intégralité du bâtiment. En effet, Kanegawa Industries comptait parmi ses employés des chercheurs et des médecins émérites, considérés comme les meilleurs du pays.
Alors qu’un homme vêtu d’une blouse similaire à celles portées par Ayame et Midori s’approchait de nous, j’ai remarqué que celle-ci était de couleur bleu ciel. Il était probable que cela servait à différencier les secteurs d’activités. L’homme n’avait pas encore remarqué ma présence, mais il s’est approché de la présidente avec une grande excitation.
̶ Madame la Présidente ! C’est agréable de vous voir aujourd’hui, avez-vous besoin de …. AHHHHHHHHH !
L’homme s’est mis à crier et à tomber sur ses fesses en me fixant. J’ai essayé de m’approcher pour participer à la conversation, mais cela n’était pas une bonne idée..
La réaction de l’homme à la vue de mon visage m’a laissé stupéfait. Ayame et Midori ont réagi avec indulgence, considérant qu’une réaction excessive était normale étant donné qu’il n’y avait personne d’autre dans ce monde avec un visage comme le mien.
J’ai tendu la main à l’homme pour l’aider à se relever, mais son cri a attiré l’attention de tout le monde, y compris le personnel médical qui chuchotait en se demandant qui j’étais.
̶ Vous allez bien monsieur ? Vous ne vous êtes pas fait mal ?
Lorsque j’ai commencé à lui parler, l’homme a finalement repris ses esprits et s’est levé en s’aidant de ma main avant de s’incliner immédiatement.
̶ Je suis vraiment désolé de ma réaction monsieur !
La situation avait fini par me mettre mal à l’aise, mais je pouvais comprendre la réaction de l’homme étant donné les circonstances exceptionnelles. C’était un peu comme si vous deviez rencontrer des extraterrestres, n’est-ce pas ?
̶ Ce n’est pas grave, je comprends la situation. Je suis désolé que mon visage si moche, ait pu vous surprendre.
̶ VOUS N’ÊTES PAS MOCHE !
Midori et tout le personnel soignant féminin ont prononcé ces mots en chœur. J’ai été tellement surpris que j’ai sursauté, car c’était parfaitement synchronisé. La clinique est restée silencieuse. J’ai regardé Midori qui était toute rouge, ainsi que le reste du personnel qui ne savait plus où se mettre.
Ayame s’approchait de moi avec un sourire amusé dans les yeux.
̶ Rossi, je crois que vous vous trompez sur un point.
̶ Qu’est-ce que vous voulez dire Présidente ?
̶ Lorsque je vous ai averti que votre apparence physique pourrait poser problème, ce n’était pas dans un sens négatif. En fait, nous n’avions jamais vu quelqu’un d’aussi beau. Pour la plupart des gens, vous seriez considéré comme l’idéal à incarner.
̶ Foutaise.
Je me sentais véritablement blessé par ce qu’elle avait dit, non pas parce qu’elle m’avait complimenté sur mon apparence, mais plutôt parce que ces gens-là semblaient rêver d’avoir un physique comme le mien. Ce genre de pensée m’horripilait car j’étais convaincu que chacun, quelles que soient ses origines, avait une beauté unique qui le définissait. Dans mon monde, j’avais côtoyé une incroyable diversité, et chaque individu avait sa propre beauté, son charme particulier. Bien sûr, dans mon monde, certaines personnes d’origine asiatique avaient recours à la chirurgie pour agrandir leurs yeux et se rapprocher des standards occidentaux. Mais pour moi, cela équivalait à renier leur identité, et je trouvais cela profondément regrettable.
Je me sentais un peu coupable, craignant que ma simple présence ne mette en danger leur propre identité.
̶ Docteur Miyama, je vous présente Alden Rossi.
Pour l’instant, il est le plus grand secret de l’entreprise et je vous prie de garder son identité confidentielle. Tous les employés de Kanegawa Industries seront également tenus au secret.
̶ Bien reçu Madame la Présidente.
̶ Pour être sûr de l’absence d’effets secondaires, j’aimerais que vous, en tant que médecin en chef de la clinique, procédiez vous-même à tous les examens de santé de Monsieur Rossi. Il vient d’une autre planète, un autre monde et nous ne savons pas si son arrivée aura des conséquences sur sa santé ou sur la nôtre.
̶ Attendez, vous voulez dire que cette pers…
Ayame interrompit immédiatement sa question, montrant son impatience.
̶ Dans quelques heures, je vous enverrai le rapport dont il est question. Toutefois, veuillez noter que je ne suis pas en mesure de répondre à d’autres questions pour le moment. J’ai juste besoin de vous pour cet examen, c’est compris ?
̶ Je m’en occupe de suite.
̶ Midori, je te confie Rossi. Je dois faire un compte-rendu de la situation. Si tu rencontres le moindre problème, n’hésite pas à me contacter par vidéo.
̶ Bien reçu !
Alors qu’Ayame quittait la pièce, je me suis retrouvé seul avec le docteur Miyama et Midori.
̶ Monsieur Rossi. Suivez moi, nous allons commencer l’examen médicale.
Finalement, j’ai suivi le docteur alors que les infirmières me scrutaient de haut en bas, comme si j’étais une proie. Elles discutaient de moi comme si j’étais un mannequin entrant dans la pièce. Il est vrai que je suis plus grand que la moyenne, assez élancé, mais peu musclé et plutôt mince. J’ai l’impression que personne n’osait travailler en ma présence. C’est pourquoi nous sommes entrés rapidement dans une autre pièce, évitant tout contact visuel.
Nous nous trouvions dans le bureau du docteur en chef de la clinique. Une pièce spacieuse avec un petit salon, un bureau et un espace réservé aux examens médicaux. Nous nous sommes installés face à face sur les canapés.
̶ Je vais vous interroger pour votre dossier médical avant de procéder à l’examen physique.
̶ Je m’en remet à vous.
Midori se tenait debout devant la porte, écoutant et observant la scène comme un soldat.
̶ Votre âge.
̶ 26 ans.
̶ Votre origine.
̶ Terrien.
̶ Terrien ?
̶ Je suis né en France sur la planète Terre. Dans le système solaire.
̶ Maladie particulière ?
Il m’a posé un nombre incalculable de questions qui semblaient interminables. Je ne saurais dire combien il en a posé, tellement il y en avait. Lors de l’examen physique, il a examiné mes yeux, mes oreilles et mes temps de réaction à la recherche de signes de maladie ou d’effets secondaires éventuels. Bien sûr, il n’a rien trouvé car je me sentais bien. Il a même constaté que j’étais en très bonne santé, bien plus que la moyenne des habitants de ce monde.
C’est plutôt étrange car je suis quelqu’un qui mange mal et ne pratique aucun sport particulier. J’ai souvent des caries. Un être humain normal en fin de compte.
L’examen avait duré plusieurs heures. Nous avions passé un scanner, une IRM et le docteur m’avait examiné en détail. J’espère qu’ils n’invoquent pas des personnes tous les jours, sinon cela représenterait une perte d’argent considérable. En attendant les résultats, j’étais assis sur le canapé dans le bureau du docteur, en train de boire du thé.
Il lisait les résultats finaux avec une expression renfrognée.
̶ Un problème docteur ?
̶ Aucun, c’est pour ça.
̶ Pas de problème, que des bonnes nouvelles.
̶ En réalité, c’est une bonne nouvelle mais aussi inquiétante. Votre corps est en très, très bonne santé. On dirait même que vous êtes un nouveau-né. Vous ne ressentez rien d’inhabituel ?
Sa question a semé le doute en moi. Au fond de ma bouche, j’avais une fausse dent suite à une grosse carie. Les nerfs avaient été retirés et la dent s’était ébréchée au fil du temps. J’avais l’habitude de toucher le trou avec ma langue, mais je ne l’avais pas fait depuis l’invocation. Maintenant rassuré par les résultats des examens, je l’ai fait machinalement, mais le trou n’était plus là. J’ai eu peur et me suis dirigé vers le miroir.
Je ne m’étais pas observé depuis mon arrivée. Quand j’ai ouvert ma bouche, j’ai remarqué que les pansements des caries n’étaient plus là et que ma dent du fond était en bon état. Mes dents étaient blanches et saines. Les légers boutons d’acné que j’avais sur le front avaient également disparu. Ma peau était nette et lisse. J’ai scruté mon visage et mon corps pour repérer tous les défauts, mais je n’ai rien trouvé et effectivement …
̶ Je viens de naître ?
CHAPITRE 4 - RENAISSANCE
Je me suis effondré sur le lit de la suite luxueuse qui m’a été prêtée pour une durée indéterminée. Bien qu’il soit d’un confort inégalé, avec une salle de bain, des toilettes et une cuisine, j’avais tout ce dont j’avais besoin pour y vivre indéfiniment. Cependant, ce n’était pas mon intention.
Allongé sur le dos, je me remémorais la journée écoulée, en particulier l’examen médical et ses résultats surprenants. Pour l’instant, le Docteur Miyama n’a aucune explication quant à l’effet bénéfique de l’invocation sur mon corps. C’est maintenant clair pour moi pourquoi on me trouvait si séduisant. L’effet secondaire de l’invocation était que toutes mes impuretés ont été éliminées, laissant place à une apparence physique des plus parfaites.
Bien que mon visage n’ait pas changé, j’étais au sommet de ma forme physique. Tout en restant allongé sur le lit, je m’amusais avec la caméra de mon téléphone, en prenant des selfies. Je pouvais constater que chaque angle de mon visage était photogénique et que je n’avais plus besoin de filtres pour améliorer mon apparence.
̶ Si je deviens acteur, ça marcherait bien non ?
Bien que j’ai besoin de me reposer, j’étais légèrement excité par la situation. J’avais dû abandonner ma colère car je n’avais pas d’autre choix que de me conformer à la situation actuelle. L’anxiété qui me tenait au creux de l’estomac avait disparu, laissant place à l’excitation.
Je dois passer un examen sportif demain, ce qui est un petit calvaire pour moi. Mais ce sera le dernier examen pour vérifier si tout va bien au niveau de ma condition physique. On vérifiera si la gravité de cette planète n’affecte pas ma performance et si je n’ai pas perdu de force particulière.
Alors que je réfléchissais aux choses que je pourrais faire dans ce monde, mes yeux commençaient à se fermer, jusqu’à ce que j’entende un toc à ma porte, me réveillant alors que je commençais à somnoler.
̶ Elle ne va jamais finir cette journée, c’est pas possible.
Je me suis levé furieux et j’ai ouvert la porte en étant énervé, en parlant de manière impolie à la personne qui frappait.
̶ Quoi ? Je dormais !
C’était Midori, avec des gros yeux et prise de panique.
̶ Midori ! Je suis désolé, je commençais à dormir et…
̶ Pas de problème Alden, c’est ma faute. Je voulais te donner ça pour que tu puisses être déjà prêt pour demain.
Elle tenait deux tenues entre les bras et un bracelet au-dessus de ces vêtements.
̶ Tu auras une tenue pour l’examen sportif et une autre pour porter lorsque tu te baladeras seul dans l’entreprise.
La tenue était sportive et fabriquée à partir d’une matière inconnue pour moi. Elle était très agréable au toucher, comme s’il n’y avait presque pas de tissu. Elle devait être très légère pour courir.
Quant à l’autre vêtement, c’était une sorte de costume composé d’un pantalon de costume noir et d’un blazer vert foncé qui s’accordaient parfaitement ensemble. Il était également de bonne qualité.
̶ Merci Midori, je vais en prendre soin.
̶ Le bracelet sert non seulement de moyen de communication, mais également de support informatique.
̶ En parlant de ça, vous n’avez pas l’écran anti espion dessus ?
̶ Comment ça ?
̶ Peux-tu ouvrir une application sur ton bracelet ?
̶ Bien sûr.
En utilisant son bracelet, elle activa une page qui afficha un moteur de recherche sur un écran holographique de taille similaire à un petit ordinateur portable de 14 pouces. Cependant, je pouvais voir clairement tout ce qui était affiché à l’écran, ce qui signifiait qu’il n’y avait aucune intimité. Tout le monde pouvait voir ce qu’elle faisait sur son appareil.
̶ C’est exactement de cela dont je parle. Même si je me trouve derrière toi, je peux voir à travers l’écran holographique. L’idée serait donc de flouter l’écran lorsque nous ne sommes pas devant, pour préserver la confidentialité. Tu comprends ce que je veux dire ?
̶ Quel serait l’objectif ou l’avantage de cela ?
̶ Cela permettrait de préserver ton intimité, bien entendu !
Ne préfères tu pas éviter que quelqu’un jette un coup d’œil à ce que tu es en train de faire sur ton écran ?
̶ Effectivement. Les gens pourraient utiliser cela de manière plus personnelle ou intime.
̶ Exactement ! Cela mérite réflexion. C’est pourquoi, tant que cela n’est pas totalement au point, je ne l’utiliserais pas, Midori.
̶ Hein ?
J’ai sorti mon téléphone pour lui montrer ce que j’utilisais. Et d’une façon moqueuse, elle me rétorqua :
̶ MAIS JE N’Y CROIS PAS ! C’EST UNE RELIQUE !
̶ C’est un peu méchant de dire ça de mon tout nouveau téléphone.
̶ Je m’excuse pour le terme, mais j’ai vu ce modèle de téléphone dans le musée des antiquités de la ville quand j’étais au collège. Cet objet remonte à plusieurs milliers d’années.
Attend, qu’est-ce qu’elle vient de dire ? Je crois que j’ai enfin compris la temporalité de ce monde. Bien que je n’aie pas encore eu la chance de voir l’extérieur clairement, j’ai pu observer la technologie qu’ils utilisent, à l’exception du téléporteur vers d’autres mondes. J’aurais misé que seulement 500 ans séparaient mon époque de la leur. Cependant, elle vient de m’informer que le smartphone n’existe plus depuis plusieurs milliers d’années ? Donc si cela fait 1000 ans, nous serions aux environs de l’année 3023 ?
̶ Dans mon monde nous en sommes encore là Midori, nous ne sommes même pas aller sur Mars.
Midori ne comprenait pas ma phrase.
̶ Mars ?
̶ C’est une planète qui est la plus proche de mon monde. Nous n’y sommes pas allé encore.
Elle commençait à rire.
̶ Ne t’inquiètes pas nous non plus, nous sommes jamais allé dans l’espace.
Elle continuait à rire comme si mes propos étaient évidents. Mais ce n’est pas vrai ! Rien n’est évident à ce sujet. Comment se fait-il qu’ils n’aient jamais réussi à aller sur une planète ? Ils ont la capacité de téléporter des individus, mais pas de voyager vers une autre planète ? Au fur et à mesure de notre conversation, j’ai réalisé que ce monde était doté d’une technologie avancée, mais qu’il manquait quelque chose ou qu’il y avait un obstacle qui entravait son progrès.
̶ Ça serait un plaisir de continuer ma conversation avec toi Alden, mais il se fait tard. Va te reposer, excuse moi encore.
Elle s’éloignait en direction d’une destination inconnue, en quittant ma chambre. Dès qu’elle a disparu de mon champ de vision, je me suis précipité sur mon lit pour ouvrir une page internet à l’aide de mon bracelet, afin de découvrir davantage d’informations sur ce monde.
̶ Fais moi voir l’histoire dès le début.
***
Malgré mon désir de dormir au mieux, j’ai passé la nuit à découvrir les merveilles de ce monde. J’ai été émerveillé par les informations incroyables que j’ai pu assimiler, bien au-delà de ce que je n’aurais jamais pu imaginer sur Terre. Je me suis vite rendu compte que nous étions en l’an 3240, soit un écart de 1217 ans entre mon monde et celui-ci. Heureusement, j’ai découvert que ce monde n’était pas affecté par la pollution ni la pénurie d’énergie fossile car les habitants utilisent ce qu’ils appellent “le mana”, une forme de magie. Je suis familier avec le concept de mana, qui a été mentionné dans de nombreuses histoires et jeux vidéo sur Terre. Ils utilisent cette énergie inépuisable, constamment renouvelable et présente en chaque être humain pour alimenter leurs appareils. Il est donc inutile d’utiliser autre chose.
Dans un second temps, mes recherches ont confirmé mes soupçons. Selon les textes que j’ai consultés, un événement majeur s’est produit au 3ème siècle après J.C. avec l’apparition de la magie au Japon. Cette énergie n’a pas existé depuis les débuts de l’humanité.
La magie a complètement bouleversé le monde et a entraîné des conflits sanglants entre le Japon, qui avait réussi à la maîtriser, et d’autres pays qui cherchaient à s’en emparer.
Les guerres mondiales et autres événements historiques ont leur importance. Cet événement a façonné le monde tel que nous le connaissons aujourd’hui. Je commence à comprendre pourquoi il n’y a que des asiatiques et aucun visage caucasien. Il est probable que le reste du monde, trop égoïste, a été anéanti par le Japon qui était devenu des êtres surhumains.
Même si cela me rendait triste, je me suis rendu compte que c’était probablement une question de survie pour tout le monde. Cependant, je savais que je ne pouvais rien faire ni rien dire, car ce n’était pas mon monde et les événements passés appartenaient au passé. Cela me rappelait l’idée qu’il n’est pas juste de reprocher à un Allemand actuel les actes commis pendant la Seconde Guerre mondiale.
Malheureusement, il y avait une mauvaise nouvelle dans tout cela, malgré la bonne. Elle concernait l’espace. Midori m’a avoué qu’ils n’avaient jamais réussi à atteindre une planète. D’après mes recherches, aucun objet ne peut sortir de leur orbite en raison d’un bouclier à grande échelle entourant leur planète, qui empêche toute sortie. Il semble que ce sujet soit même un peu tabou. Selon mes informations, ce bouclier ne serait pas de nature matérielle, mais plutôt magique. Étant un étranger dans ce monde, je me pose des questions, mais je dois les oublier, car cela ne ferait que m’attirer des ennuis.
J’avais effectué des recherches approfondies sur les sujets qui me préoccupaient ou qui me semblaient importants pour naviguer dans ce monde. Bien que j’aie encore beaucoup à apprendre, je suis conscient qu’il est préférable de prendre son temps plutôt que de se presser.
Après m’être douché et préparé en enfilant une tenue de sport, je suis sorti de ma chambre pour me rendre à l’examen. Midori et Ayame m’attendaient à l’extérieur, toutes deux élégantes et pimpantes. Elles se ressemblaient tellement qu’on aurait pu les prendre pour des sœurs, bien que l’une soit nettement plus âgée que l’autre. Je me suis même demandé si la magie résiduelle dans leur corps avait un effet sur leur apparence physique.
̶ Bonjour Monsieur Rossi, nous pouvons y aller ?
̶ Vous attendez depuis longtemps ?
̶ Non, aucunement seulement quelques minutes.
̶ Je vous suis Présidente.
̶ Le programme d’aujourd’hui sera simple et mettra fin à tous les examens. Tout d’abord, nous allons tester votre endurance sur le terrain d’athlétisme, ce qui est essentiel pour vérifier votre condition physique. Ensuite, nous passerons au terrain d’entraînement intérieur pour évaluer vos autres compétences. Nous vous donnerons plus de détails à ce sujet.
Alors que nous nous dirigions vers le lieu de l’examen à travers les couloirs de l’entreprise, Ayame m’a expliqué le programme de la matinée. Même aujourd’hui, les employés me regardaient avec une grande intensité. Bien qu’un communiqué leur ait été envoyé pour les informer de ma présence, cela ne m’a pas permis de passer inaperçu, au contraire. Je me demande s’ils réussiront à s’adapter, mais d’une certaine manière, c’est assez divertissant.
Lorsque nous sommes arrivés sur le terrain d’athlétisme, j’ai pu mesurer l’ampleur de cette entreprise. C’était d’une immensité difficilement concevable. Bien que le terrain se trouvait à l’intérieur, le plafond était équipé d’une technologie qui reproduisait parfaitement la sensation d’être à l’extérieur, avec le soleil, les nuages et le vent. Si on m’avait demandé les yeux fermés de deviner où je me trouvais sans avoir parcouru le chemin, j’aurais sans aucun doute affirmé être à l’extérieur à 100%.
Le terrain ressemblait à un terrain d’athlétisme classique, avec un grand espace vert au centre. Ayame et Midori étaient assises sur les tribunes, situées à l’est, pour me surveiller. Une oreillette était placée dans mon oreille droite pour que je puisse les entendre.
̶ Monsieur Rossi, vos diodes sont-elles bien en place ?
̶ Oui, tout est en place.
La tenue de sport que Midori m’a donnée hier soir comportait des emplacements spécialement conçus pour y insérer des diodes sans fil qui transmettaient mes performances physiques à la tablette d’Ayame. C’était vraiment pratique.
̶ Vous pouvez commencer à courir quand vous voulez.
̶ Je n’aime pas courir, je n’aime pas le sport.
Je me suis mis à trottiner comme on me l’avait demandé. Cela faisait un moment que je n’avais pas couru de demi-fond.
Elle verra bien que je n’ai pas d’endurance.
Je ressentais une sensation plutôt inhabituelle dans mon corps lorsque je trottinais, car je ne me sentais pas fatigué du tout. Peut-être était ce dû au fait que je faisais attention à ma respiration et à ma posture. J’avais pratiqué cela de nombreuses fois dans le passé, peut-être que ça avait laissé des traces.
̶ PLUS VITE !
Comment ça “plus vite” ?
Je ne voulais pas prendre le risque de parler et de me retrouver avec un point de côté, alors j’ai obéi et j’ai accéléré.
̶ PLUS VITE J’AI DIT !
Encore “plus vite” ? Tu veux que je me mette à courir ?
J’ai commencé à courir plutôt qu’à trottiner, mais en faisant attention à ne pas me fatiguer, afin de montrer que j’ai de l’endurance malgré tout.
̶ ALDEN !
Cette fois-ci, c’était Midori qui parlait dans l’écouteur.
̶ S’IL TE PLAÎT, SPRINTE ! COURS DE TOUTES TES FORCES.
Oh et puis merde.
Elles m’ont toutes les deux agacé au point que j’ai cédé, pris appui sur mon pied droit et commencé à courir de manière intensive.
Mais tout semblait figé autour de moi. Ayame et Midori étaient immobiles, la bouche ouverte, car elles me demandaient de courir. Pour ma part, je ressentais à nouveau cette sensation agréable qui m’envahissait. C’était une chaleur très plaisante, mais cela me gênait également. On aurait dit que le sang coulait dans mes veines d’une manière harmonieuse.
Fermant les yeux un instant tout en continuant de courir à pleine vitesse, j’ai visualisé ma course et concentré la chaleur que je ressentais uniquement dans mes jambes. Cela m’a permis de courir à une vitesse inouïe, beaucoup plus rapide que ce que la plupart des gens peuvent atteindre, en seulement quelques fractions de seconde.
J’ai couru à cette vitesse pendant trois tours de piste avant de m’épuiser complètement et de m’effondrer sur le sol.
̶ 480km/h ?!
̶ TU PLAISANTES MAMAN ?!
̶ Sans utiliser de magie en plus de ça… C’est impossible, mais c’est bien indiqué sur les relevés.
̶ Si le terrain mesure 400 mètres, est-ce que cela signifie qu’il a fait 3 secondes pour faire le tour complet du terrain ?
Alors que je gisais essoufflé sur le sol, à l’endroit où j’étais parti, j’entendais Ayame et Midori parler et je comprenais clairement que même pour elles, courir à une telle vitesse était impossible. Pour ma part, j’étais absolument ravi. Courir à une vitesse surhumaine de 480 km/h était tout simplement un rêve d’enfant devenu réalité. Je me sentais complètement comblé et satisfait de cette réussite.
Je percevais deux visages au-dessus de moi qui me masquaient la vue. Ayame et Midori s’étaient rapprochées de moi et me regardaient avec une expression gênée.
̶ Monsieur Rossi, mais qui êtes-vous ?
CHAPITRE 6 - SOURCE
Je fus troublé par cette question : pourquoi me la posait-elle ? Après tout, dans un monde où la magie existe, dépasser les limites humaines devrait être quelque chose d’ordinaire.
̶ Je suis juste Alden Rossi.
̶ Alden, ce n’est pas normal d’être aussi rapide sans magie.
̶ Pourquoi ça Midori ?
̶ Monsieur Rossi, non, je vais t’appeler Alden dès maintenant.
La présidente Ayame avait adopté un ton plus familier à mon égard, marquant ainsi un changement dans sa manière de s’adresser à moi.
̶ La pratique de la magie n’est pas une chose aisée, même si tous les êtres humains de ce monde en ont la capacité. Elle requiert une certaine expertise et il existe des écoles spécialisées pour l’apprendre. Généralement, pour accomplir ce que tu as fait, il faut maîtriser la magie de renforcement, suivie de celle du vent. Or, tu as réussi à le faire sans recourir à aucune magie.
̶ Comment pouvez-vous savoir que ce n’était pas de la magie ?
̶ Il n’y a eu ni d’incantation ni de halo lumineux de mana qui t’entourait. Normalement, tout le monde est plus ou moins capable de ressentir la magie lorsqu’elle est utilisée. Nous n’avons rien ressenti lorsque tu as utilisé cette super vitesse.
̶ Qu’est-ce que c’était, si ce n’était pas de la magie ?
̶ Je ne sais pas.
̶ Vous ne savez pas Présidente ? Vous n’avez jamais vu ça ?
̶ Je ne sais pas ce qui se passe et cela me dérange. Depuis ton invocation, je n’ai plus aucun contrôle sur les événements, ce qui me déplaît fortement.
Bien que je n’aie pas utilisé de magie, j’ai clairement ressenti une sensation de chaleur m’envahir lorsque j’ai utilisé ce pouvoir. Il doit donc y avoir une autre source d’énergie en jeu. Dans mon monde, il existe de nombreuses sources d’énergie décrites dans les livres. Mais ici, je ne sais pas ce que cela pourrait être. Peut-être s’agit-il simplement de dons surnaturels ?
̶ Nous allons passer rapidement à l’examen suivant afin de vérifier tes capacités. Viens avec moi, Alden.
Nous nous sommes dirigés vers le prochain lieu et j’ai remarqué qu’Ayame était très déterminée, sa fibre scientifique refaisant surface malgré la situation incontrôlable. Elle était excitée et cela se voyait. Midori avait également remarqué cela et semblait heureuse de voir sa mère ainsi.
Nous nous sommes précipités vers le prochain examen, situé également à l’intérieur mais dans une salle un peu plus étroite. J’ai immédiatement compris que c’était une salle d’entraînement. Je pense que nous allons passer à l’étape supérieure et cela commence à me faire un peu peur pour la suite.
̶ Le programme est simple Alden.
̶ Je suis prêt Présidente, je vous écoute.
̶ Afin de déterminer la source de mana que tu utilises, je vais te faire parvenir des droïdes de combat que nous avons conçus. Ils sont très agiles, mais ne t’en fais pas, si quelque chose se passe mal, nous interviendrons pour arrêter les droïdes.
̶ Bien… Très bien, je compte sur vous. Je voulais simplement vous informer que je ne suis pas habitué à me battre.
̶ Fais comme si ta vie en dépendait.
Oh ouais, c’est la totale ! Un combat à mort pour un gars ordinaire, c’est comme si on envoyait un chat pour combattre un lion. C’est complètement dingue !
Alors que le droïde fonçait sur moi, j’ai été pris de panique à l’idée de son départ imminent. Je me suis retrouvé pris au dépourvu, sans savoir comment réagir.
Autant jouer le jeu.
J’ai adopté une posture défensive médiocre, comme si j’étais sur un ring de boxe, face à ce droïde qui avait l’air d’une créature féroce, mélangeant traits de chien et de sanglier géant. Je me suis demandé ce qu’ils avaient essayé de créer, car l’esthétique était franchement laide. J’ai maintenu mon regard fixé sur lui, sans savoir quoi faire.
Lorsque le chien-sanglier s’est approché de moi et a sauté pour me mordre au cou, j’ai ressenti à nouveau cette agréable chaleur en moi. J’ai réussi à la contrôler et à l’utiliser pour esquiver l’attaque en déplaçant cette chaleur à travers tout mon corps. Le droïde m’a paru étrangement lent et j’ai facilement esquivé son attaque. Profitant de cette opportunité, j’ai dirigé la chaleur vers ma jambe gauche et lui ai asséné un coup de pied dans les fesses.
Mon coup de pied a projeté le droïde en l’air, le faisant voltiger jusqu’au plafond où il s’est encastré avec force, provoquant une onde de choc qui a fait tomber des débris du plafond. J’étais ébahi, réalisant soudain la puissance incroyable dont j’étais doté.
Je me sentais comme un nouvel être, capable d’accomplir des prouesses extraordinaires. Mon potentiel semblait infini et je réalisais alors que je pouvais non seulement transformer ma propre vie, mais également influencer le monde qui m’entourait de manière inimaginable. C’était comme si mes ailes s’étaient enfin déployées et que j’étais prêt à m’envoler vers des horizons insoupçonnés.
Je vais enfin pouvoir donner un véritable sens à mon existence.
CHAPITRE 6 - SOURCE
Lorsque je me défendais contre les chiens-sangliers, j’ai réalisé que ma force était issue de la chaleur en moi, c’était comme ces habitants de ce monde, une sorte de mana. Cette chaleur intérieure s’épuisait au fur et à mesure que je l’utilisais. Toutefois, en me reposant, elle se régénérait, me permettant de mieux l’utiliser par la suite. Désormais, j’appelle cette source de pouvoir qui réside en moi la “Source”. C’est une sorte de fontaine intérieure qui me permet de puiser de l’énergie. Cette constatation est corroborée par le fait que j’ai joué avec les droïdes d’Ayame pendant une heure sans ressentir la moindre fatigue.
Cependant, j’ai remarqué que j’étais épuisé plus tôt lorsque j’ai utilisé ma super vitesse, peut-être parce que cette action nécessitait une source d’énergie plus importante. En revanche, esquiver et donner des coups pour briser les droïdes ne demandaient pas autant de ressources. Durant cette heure, j’ai expérimenté avec ma Source et j’ai pu la déplacer et la contrôler à ma guise. En la concentrant dans mes jambes et en imaginant une puissance phénoménale, ma force était décuplée, que ce soit dans mes bras ou mes poings. En ajoutant ma Source à l’imagination de l’action, l’effet se produisait automatiquement.
Après avoir saisi ce concept, j’ai commencé à réfléchir à d’autres façons d’utiliser ma Source. Je me suis demandé si elle était uniquement destinée à renforcer mon physique ou si elle pouvait être utilisée pour autre chose. Pour répondre à cette question, j’ai sollicité l’aide d’Ayame et de Midori.
J’ai compris que ma Source était l’équivalent d’un carburant ou d’une énergie fossile nécessaire pour activer un pouvoir.
̶ J’ai une question, ou plutôt une demande à faire.
̶ De quoi as-tu besoin, Alden ? Souhaites tu faire une pause ?
̶ En réalité, Madame la Présidente, ce que j’aimerais, c’est que vous m’enseigniez l’un des sorts les plus élémentaires que vous connaissez avec votre magie. Serait-ce possible ?
̶ Un sort ?
Ayame et Midori semblaient perplexes face à mes propos et ne semblaient pas comprendre. Cependant, ce n’est pas un problème, car je suis sûr qu’elles comprendront bientôt.
̶ Midori je te laisse faire, tu es plus douée que moi en magie.
̶ Compris, je m’en occupe.
Midori s’est approchée de moi. Les droïdes avaient cessé d’arriver, laissant la salle d’entraînement jonchée de cadavres de chiens-sangliers et, au milieu, Midori et moi-même.
̶ Tout d’abord, Alden, il est important de comprendre que la magie est un élément complexe à manipuler. Chaque individu a une quantité de mana qui lui est propre, et s’il n’y en a pas suffisamment, il ne sera pas capable d’utiliser le sort qu’il souhaite. Notre énergie est située au niveau de notre estomac, et c’est là que nous récupérons le mana. Une fois que tu actives le mana dans ton corps, tu peux le déplacer dans la partie de ton corps dont tu as besoin pour utiliser ton sort.
Pendant qu’elle m’expliquait, j’ai pu voir qu’elle procédait également à l’action pour me montrer concrètement ce qu’elle voulait dire.
̶ Bien sûr, même si tu sais comment utiliser ton mana, il est important de savoir quelle quantité est nécessaire pour lancer un sort. C’est pour cette raison que l’apprentissage est indispensable en magie. Si tu n’en mets pas assez, le sort ne fonctionnera pas, et si tu en mets trop, tu pourrais blesser quelqu’un, voire te blesser toi-même.
Ce qu’elle me dit est bien plus complexe que ce que j’imaginais. Pour lancer un sort, il est nécessaire de connaître la quantité de magie à utiliser. Si tu es doué et que tu y arrives du premier coup, tant mieux, sinon tu dois l’apprendre dans une école spécialisée.
̶ Sur internet, il ne t’aide pas à l’utilisation d’un sort ?
̶ Le gouvernement a interdit l’enseignement de la magie en ligne en raison de la prolifération de faux conseils donnés par des personnes malhonnête, ce qui a causé de nombreux problèmes.
C’était évident, chaque époque à son lot de débiles.
̶ Une fois que tu as déterminé la quantité de magie nécessaire pour ton sortilège et pour chaque partie du corps impliquée, tu peux passer à l’étape de l’incantation. Cette étape te permet en général de visualiser ton sort et de le lancer. Bien que possible sans incantation, cette méthode est généralement réservée aux experts en magie, car elle demande une vie entière d’apprentissage.
̶ Pourquoi ça ?
̶ Pense à l’incantation comme à une mesure de sécurité. C’est comme un ordinateur : si tu veux lancer un programme, tu dois cliquer dessus. Sinon, rien ne se passe. En magie, c’est la même chose : sans incantation, rien ne se produit. C’est une mesure de précaution essentielle, car si la magie était activée accidentellement, les conséquences pourraient être catastrophiques.
̶ Mais ceux qui arrivent, ils ajoutent un programme pour le faire juste avec la pensée.
̶ Exact, mais tout de même ça reste dangereux.
̶ Je ne pense pas que ce soit correct. La première étape de la magie est simplement d’activer ta source de magie, située dans ton estomac. Si nous prenons l’exemple encore de l’ordinateur. Si tu ne l’allumes pas : rien ne se passe. Est-ce bien ça ?
̶ En effet.
̶ Donc, même si tu n’incantes pas, tant que bloques ton mana il n’y a aucun problème à avoir.
Midori observait sa mère avec étonnement.
̶ Il a tout à fait raison, Midori.
̶ Je n’avais jamais considéré cela auparavant. Toutefois, bloquer ton mana serait très difficile, car il est omniprésent dans l’environnement et se régénère constamment à partir du mana ambiant. Il faudrait donc également bloquer le mana présent dans l’air.
Nous étions engagés dans une conversation fascinante qui aurait pu durer des heures, mais il est temps de mettre fin à cela. Ce sujet m’a captivé et je veux en apprendre davantage. Cependant, je n’utilise pas de mana, mais plutôt la Source. Je me demande si je peux utiliser des sorts avec mon énergie.
Midori réfléchissait profondément. J’avais appris qu’elle était spécialisée dans le domaine de la magie au sein de l’entreprise, et qu’elle était responsable de son propre département. Maintenant, je comprends mieux pourquoi ce sujet l’intéresse tant.
̶ Midori.
̶ Oui, pardon, je me perds. Je disais quoi déjà.
̶ L’incantation te permet de visualiser le sort et de le lancer.
̶ Tu suis trop bien. Tu ne veux pas l’embaucher maman ?
Ayame affichait un sourire crispé, comme si elle avait été prise en faute.
Elle plaisante ?
̶ Une fois que tu incantes, le sort commencera à prendre forme et tu seras prêt à le lancer complètement. En résumé, il y a trois étapes pour lancer un sort : l’activation de ton mana, le contrôle de la quantité de mana à utiliser, et l’incantation.
C’est simple et efficace. Avec la Source, je suis déjà capable de maîtriser les deux premières étapes.
Midori tendait son bras avec la paume ouverte en direction d’un espace vide et sécurisé, en veillant à ne viser personne.
̶ Magie de terre : Lance de Gnome
Lorsqu’elle a annoncé qu’elle utilisait la magie de terre, un halo lumineux de couleur marron a entouré son bras et une sorte de pierre s’est formée. Ensuite, lorsqu’elle a prononcé le nom de son sort, une grande lance est apparue dans sa main à l’endroit où elle avait envoyé sa magie. C’était la première fois que je voyais de la magie dans ce monde, et c’était magnifique. L’apparition rapide de la lumière et de l’objet qui n’existait pas auparavant était grandiose.
̶ Voici comment marche la magie de ce monde Alden.
J’ai tendu mon bras en direction d’un espace vide et j’ai dirigé ma Source vers ma main. En repensant à la lance que Midori avait invoquée, elle est apparue dans ma main. J’ai récité l’incantation de travers, même si elle était déjà dans ma main à la seconde où je l’avais représentée dans mon esprit.
̶ Lance de Gome ?
Je regardais Midori, stupéfait par ma réussite, tandis qu’elle exprimait son étonnement.
̶ Heeeeeeeeeiiiiiiin ?!
CHAPITRE 7 - UNIQUE
Ayame accourut vers moi en courant et me saisit par les épaules en me secouant.
̶ Mais qui es-tu à la fin ?!
Mes paroles étaient hésitantes car Ayame me secouait assez brusquement, me faisant perdre mes repères.
̶ Juuuste Aldeeeen.
Elle s’éloigna en voyant que cela me mettait mal à l’aise.
̶ Présidente, vous me l’avez déjà demandé plus tôt. Ma réponse reste la même, je suis toujours Alden.
̶ Ce que tu viens de faire est exceptionnel ! Et en plus, tu l’as fait sans utiliser de magie !
̶ J’ai compris avec vos réactions et je sais bien que ce n’était pas de la magie.
̶ Comment le sais-tu ? Étais tu conscient d’utiliser autre chose ?
̶ Oui, j’ai nommé cela la “Source”. Je ressens une sorte de chaleur que je peux contrôler et utiliser comme bon me semble. Je voulais tester si je pouvais l’utiliser pour lancer un sort, et effectivement, je peux faire comme vous.
̶ Alden. Ce que tu me dis, tu l’as déduit depuis combien de temps ?
̶ Au moment où j’ai frappé le premier droïde.
Ayame se frottait l’arrière du crâne et échangeait des regards avec Midori. Elles semblaient se comprendre mutuellement, mais moi, j’étais perdu.
̶ N’es-tu pas intéressé par un poste chez Kanegawa Industries ?
̶ Pardon ?
La proposition d’Ayame m’a plutôt choqué. Pourquoi voudrait-elle m’embaucher ? Pour sécuriser mes pouvoirs ? Je sais qu’ils sont rares et que je peux lancer des sorts uniquement avec ma Source. Mais j’ai surtout réalisé quelque chose : je peux tout faire avec cette énergie.
̶ Nous avons besoin de quelqu’un comme toi : perspicace, intelligent et très instruit. Midori m’a parlé de ton idée pour les bracelets et de ta technologie anti-espion.
̶ Je lui en ai bien parlé.
̶ Elle m’a expliqué que tu ne porterais pas le bracelet tant que la technologie anti-espion ne serait pas mise en place. As-tu d’autres idées ou des réflexions sur ce qui pourrait être utile pour ce monde ?
̶ Je dois sortir un peu pour pouvoir vous en dire plus, je vous ferai un compte rendu de mes impressions par la suite.
̶ C’est vrai, tu n’es pas sortie depuis hier. On te garde enfermé ici, mais je pense qu’il est temps que tu découvres notre pays.
Enfin, le moment est venu pour moi de découvrir le monde dans lequel je vais désormais vivre.
̶ C’est bientôt l’heure d’aller déjeuner.
̶ Je vais aller réserver une table au restaurant, Présidente.
Midori s’éloigna pour appeler un restaurant.
̶ Je te laisse réfléchir pour l’offre Alden. Je suis vraiment sérieuse.
̶ Je ne suis ni chercheur ni scientifique, donc je ne pourrais pas vous être d’une grande aide.
̶ Pas besoin de t’inquiéter pour ça, nous avons plusieurs départements différents et il y en aura certainement un qui t’intéressera. Et si tu as d’autres idées comme celle de l’anti-espion, ce serait formidable de te les confier, étant donné que tu as les compétences pour les mettre en place.
Ce qu’elle me propose semble incroyable, je n’aurais jamais imaginé une telle opportunité sur Terre. Je n’étais qu’un simple informaticien qui aidait les vieux dans mon monde, mais ici, je serais vraiment dans mon élément. Si on me confie un projet, je devrais être bien payé, n’est-ce pas ?
̶ Je vous tiendrais au courant Présidente, promis.
̶ Parlons-en autour d’un repas.
̶ Maman, Alden. Nous pouvons y aller, ils nous réservent la plus belle table.
̶ Je vous suis toutes les deux.
°°°
Je suis retourné dans ma chambre pour me changer, après avoir lavé et séché la tenue que j’avais portée lors de l’invocation. Les machines à laver et sèche-linge de ce monde sont incroyables ; en quelques instants, les vêtements sont nettoyés et prêts à être portés à nouveau. Il est pratique de pouvoir se changer rapidement car il est préférable de ne pas attirer l’attention en portant les vêtements de l’entreprise en ville. On peut très vite attirer l’œil.
Le travail chez Kanegawa Industries représente l’apogée de la réussite professionnelle. Les employés de cette entreprise sont les meilleurs dans leur domaine et tout le monde aspire à y travailler. Considérée comme la meilleure entreprise de tous les temps, Kanegawa Industries a créé les bracelets holographiques ainsi que les boutiques affiliées qui les vendent, les voitures volantes et les armes militaires. Toutes leurs créations sont des révolutions technologiques et scientifiques. C’est dans cette grande entreprise détenue par Ayame Kanegawa que toutes ces inventions ont été conçues. Il est préférable de ne pas trop faire de publicité sur le fait que tu travailles là-bas, car cela peut susciter des jalousies ou t’attirer des personnes mal intentionnées.
Nous avons été récupérés par le chauffeur d’Ayame, qui nous conduit au restaurant à bord de sa voiture volante. Toutefois, ces véhicules ne sont pas véritablement “volants”, car ils n’ont pas de roues dans certaines zones pour améliorer la vitesse et fluidifier la circulation.
En revanche, dans les zones urbaines, les roues sont nécessaires et la vitesse est bridée pour des raisons de sécurité. Le système de lévitation de ces voitures ressemblent davantage aux hoverboards du film “Retour vers le futur“.
Ce qui m’a étonné, c’est que ces véhicules sont pilotés par des êtres humains et non par une intelligence artificielle. Cela m’a perturbé et cela continue de me perturber, car je réalise qu’il doit y avoir des limites dans le développement de l’IA puisque, ils n’ont pas de voitures autonomes, cela semble indiquer que les IA ne sont pas encore assez avancées. Il semblerait que la fabrication de droïdes de combat soit bien plus avancée, ce qui soulève la question de savoir pourquoi il n’y a pas eu autant de progrès dans le développement de voitures autonomes. Les deux domaines ne sont pas si différents, après tout.
La ville était absolument remarquable avec sa combinaison de culture japonaise et de modernité futuriste. Il était clair que la monarchie gouvernait la ville, car certaines infrastructures semblaient être de nature royale. Le mélange de styles était indescriptible et difficilement imaginable sur Terre.
Lorsque nous sommes arrivés devant le restaurant, mon physique n’a pas manqué d’attirer l’attention. Les passants ont arrêté ce qu’ils faisaient pour me regarder, et j’ai pu lire la curiosité et le jugement dans leurs yeux. Je sais que ce sera mon quotidien maintenant et qu’il va falloir que je m’y habitue.
Nous n’avons pas été à l’extérieur assez longtemps pour devenir des éléments perturbateurs. Mais nous allons certainement l’être tout autant à l’intérieur du restaurant. Quand nous sommes entrés, la personne à l’accueil a immédiatement reconnu Ayame et Midori et nous a demandé de les suivre.
Nous nous sommes dirigés vers une salle plus calme et élégante, à l’écart des regards. Nous avons enlevé nos chaussures et nous sommes assis sur les tatamis, suivant la coutume japonaise. Je suis content que cette tradition soit préservée malgré la monarchie.
̶ Choisis ce que tu veux Alden, je régale.
̶ Merci Présidente.
Je ne vais pas me gêner.
CHAPITRE 8 - INTEGRATION
Je me délectais du repas avec une voracité qui laissait croire que je n’avais pas mangé depuis des jours. La saveur était si exquise que je ne parvenais pas à m’arrêter. Les brochettes de viande, les rumsteaks, les entrecôtes… Tout était parfaitement grillé, tendre à souhait à l’intérieur. La viande ne coûtait pas aussi cher que dans mon Japon d’origine, probablement parce que ce pays n’était pas une île. Ils disposaient de toutes les infrastructures nécessaires pour subvenir aux besoins de leur population, ce qui était un véritable atout. Pas d’importations provenant d’autres pays, tout était produit localement. Leur économie était véritablement prospère.
̶ Il va te ruiner maman.
̶ Eh bien, Alden, quand j’ai mentionné que je t’invitais, peut-être que c’était simplement pour sauver les apparences, tu vois.
̶ QUOIIII ?
Alors que j’avais la bouche pleine, j’ai été stupéfait par son changement soudain de discours. Cependant, cela a eu pour conséquence de salir mon t-shirt.
̶ Je n’y crois pas, je viens de me salir. Vous voyez quand vous dites des bêtises, je perds mes moyens.
̶ Midori, c’est de ma faute ?
̶ Écoute, tu sais que c’est de notre faute si Alden est complètement fauché, alors oui, c’est carrément toi qui lui as fait peur et c’est pour ça qu’il est dans cet état.
̶ Mais c’est une blague !
̶ Maman, ça ne l’empêche pas de continuer à manger.
̶ Pour me faire pardonner, nous irons acheter des vêtements pour enrichir ta garde-robe. J’ai également pris toutes les mesures nécessaires pour que tu sois reconnu en tant que citoyen et que tu aies une identité.
J’ai cessé de manger car ce qu’elle me disait était un sujet très sérieux pour moi. En effet, je suis dépendant de Kanegawa Industries, mais c’est à cause d’eux que je le suis. Par conséquent, ils ont des responsabilités et sont tenus de prendre les mesures nécessaires pour que je puisse vivre en toute liberté.
̶ Dans un premier temps, voici pour toi.
̶ Pourrais-tu mettre ton bracelet cette fois-ci et le mettre en marche ?
̶ Qu’est-ce que c’est ?
̶ S’il te plaît, pourrais-tu le faire ?
J’enfilais le bracelet holographique autour de mon poignet, et dès que je l’activais, une multitude de notifications et de courriels affluaient, concernant la validation de comptes bancaires, d’assurances, de permis de conduire, et bien d’autres choses encore. Tout ce qui était nécessaire pour vivre ici, et tout à mon nom. Quant au permis de conduire, je devais le passer, car évidemment, je ne savais pas piloter une voiture volante.
Il y avait même un document de demande d’identité en cours, muni d’un sceau de la princesse, ce qui m’a vraiment surpris, pour être honnête.
̶ Présidente, la Princesse est au courant ?
̶ Le rapport que j’ai présenté hier était spécifiquement destiné au gouvernement. En tant que présidente de l’entreprise Kanegawa Industries, j’ai des obligations de transparence. Les événements d’hier et d’aujourd’hui ont été communiqués au Royaume.
̶ Est-ce que ce n’était pas un peu précipité d’informer de ma présence aussi rapidement ?
̶ Je comprends ton inquiétude, mais il faut savoir que la Princesse est une personne extrêmement bienveillante et intelligente. C’est pourquoi elle souhaite avoir une entrevue.
̶ Elle veut me voir ?
̶ Effectivement, il serait préférable de faire cela rapidement. Nous sommes invités là-bas dès demain.
̶ Je comprends pourquoi tout a été fait si rapidement.
̶ C’est là que Kanegawa Industries présente un avantage. Si tu as terminé de manger, nous pouvons commencer à faire des achats pour te trouver des vêtements pour demain.
Le repas a été écourté, mais nous étions dans la plage horaire de pause déjeuner que l’entreprise accorde à ses employés chaque jour. Ils bénéficient de conditions de travail vraiment excellentes et ont tous la possibilité de prendre une pause déjeuner de 1h30 s’ils le souhaitent.
Ayame s’est chargée de régler l’addition et nous avons commencé à quitter le restaurant. Étant dans un lieu obscur, la luminosité extérieure m’a aveuglé, révélant ainsi le paysage environnant que je n’avais pas pu bien distinguer auparavant. Je croyais devoir me hâter pour éviter d’attirer l’attention, mais peu importe, il était temps que je m’habitue aux regards. J’ai donc pris le temps d’observer attentivement les alentours et la rue commerçante dans laquelle nous nous trouvions.
CHAPITRE 9 - CRIME
̶ Êtes-vous certaine que j’ai réellement besoin d’autant de vêtements ?
̶ Il est essentiel, Alden, de repartir de zéro dans ta nouvelle vie, et cela implique de commencer avec un minimum de choses, y compris des vêtements.
Ayame et Midori étaient bien plus enthousiastes que moi. Nous avions passé des heures à essayer toutes sortes de vêtements, dans des boutiques aussi chères les unes que les autres, avec les collections les plus renommées du pays. Était ce pour leur seul plaisir de me voir dans ces tenues ? J’avais vraiment l’impression d’être dans un autre monde. Quand j’étais avec ces deux-là, j’avais l’impression que toutes les portes étaient ouvertes. Les boutiques que nous avions visitées étaient toutes assez similaires. Il n’y avait plus de cabines d’essayage, mais des miroirs qui reflétaient la tenue que vous souhaitiez essayer. C’était incroyable, comme une sorte de réalité augmentée ajoutée au miroir. Le futur était bel et bien là, et parfois j’avais tendance à l’oublier, comme si je m’habituais de plus en plus à cet environnement. Heureusement, j’étais content de me prendre une claque de temps en temps pour me rappeler que j’étais bien dans un autre monde.
Tout ce que nous avions acheté était en cours de livraison à Kanegawa Industries, nous n’avions rien pris avec nous pour ne pas nous encombrer. Il y avait une seule tenue qui m’avait particulièrement plu et que j’ai finalement choisie de porter. J’avais jeté les vêtements que je portais précédemment. Je ne voulais plus rien qui me rappelle mon ancien monde, cela me faisait trop souffrir d’y penser. Chaque fois que ces souvenirs remontaient, j’avais la gorge serrée.
J’ai également acheté des lunettes de soleil et une casquette, ce qui nous permettait de passer un peu plus inaperçus dans les rues commerçantes. Les regards qui se posaient sur nous étaient principalement ceux de femmes curieuses de voir à quoi je ressemblais, étant donné ma taille de mannequin et les vêtements de haute couture que je portais. Quant aux regards des hommes, ils étaient tous dirigés vers Midori et Ayame. Ce sont de très belles femmes et elles ne passent pas inaperçues non plus.
̶ C’est un peu mieux pour toi Alden.
̶ Comment ça Midori ?
̶ Tu attires moins le regard.
̶ Oui, j’apprécie un peu plus la sortie.
̶ Que diriez vous de faire une pause et d’aller manger ou boire quelque chose ? Est-ce que cela vous convient ?
̶ Oui, maman, cela fait un certain temps que nous marchons.
̶ J’ai un endroit génial en tête qui propose des glaces délicieuses ! Est-ce que tu aimes les glaces, Alden ?
̶ Oui, les glaces plaisent à tout le monde.
Après avoir visité toutes ces boutiques de luxe, nous décidons de faire une pause dans un glacier plus abordable, du moins par rapport aux boutiques que j’avais vues jusqu’à présent. C’est une petite échoppe située en pleine rue, avec un comptoir ouvert où de nombreuses personnes passent commande. C’était agréable de voir qu’Ayame et Midori apprécient également la simplicité et ne se limitent pas seulement au luxe.
Effectivement, les glaces étaient délicieuses. Ce petit commerce avait de petites tables où l’on pouvait s’installer pour déguster leurs glaces. J’aimais prendre ce moment pour me détendre, fixer un point et vider mon esprit. C’était un moment apaisant où je pouvais me relaxer, et la glace contribuait grandement à ma tranquillité.
̶ ALDEN !
̶ Oui ?
Midori m’avait fait peur, j’étais tellement absorbé dans mes pensées que je ne prêtais plus attention à mon environnement.
̶ Un problème ?
̶ Non pardon, j’étais concentré à me vider la tête.
̶ Finalement, tu as une idée de ce qu’on pourrait faire pour améliorer le pays ?
Ayame était très intéressée par mon opinion sur leur monde. Elle me l’avait déjà demandé par le passé. Cependant, avec tout ce que j’ai pu observer jusqu’à présent, il y a tellement de possibilités de créations. Il reste encore tant de choses à découvrir dans ce monde.
̶ J’ai quelque chose à vous proposer, mais je n’y connais pas grand-chose dans votre domaine.
̶ Toute proposition est bienvenue. Mis à part la technologie anti-espion pour les bracelets, as-tu une autre idée en tête ?
̶ Vous n’avez pas de voiture autonome ?
̶ Autonome ?
̶ Une voiture qui n’a pas besoin de conducteur, équipée d’une intelligence artificielle.
̶ Alden, l’intelligence artificielle. Dans ton monde, quelle est sa progression ?
̶ Elle est omniprésente, bien qu’elle ne soit pas encore parfaite. Nous l’utilisons déjà abondamment, que ce soit dans les voitures, les téléphones portables, voire même dans la création de robots. Tout est encore à un stade préliminaire, mais il est fort probable qu’au cours des prochaines années, nous atteindrons un point culminant prometteur.
̶ C’est remarquable. De notre côté, nous sommes confrontés à de nombreux défis de nos jours, qu’il s’agisse de questions éthiques, de problèmes politiques ou surtout d’une pénurie de personnel qualifié pour développer une IA solide.
̶ Je suis surpris que vous n’arriviez pas à y parvenir malgré les ressources dont vous disposez.
̶ Ce n’est pas que nous sommes incapables d’y parvenir, mais il nous manque quelque chose et il est difficile de le trouver.
Je n’arrivais pas à saisir le sens de sa phrase. Ils semblent attendre quelque chose, mais quoi exactement ? Si même la présidente d’une des plus grandes sociétés technologiques n’en a pas la réponse, alors personne ne peut prétendre le savoir.
̶ Présidente, vous êtes quand même en train d’y travailler ?
̶ En réalité, c’est classé confidentiel, mais je pourrais te le montrer plutôt que d’en parler. Cela serait préférable.
̶ Si c’est classé confidentiel, pourquoi voulez-vous me montrer ?
̶ Je place de grands espoirs en toi et j’ai confiance en ton potentiel.
Je trouve étrange qu’elle puisse avoir confiance en moi après seulement un jour de vie sur cette planète. Nous nous connaissons à peine. Personnellement, j’ai du mal à accorder ma confiance à des personnes que je ne connais pas encore bien.
̶ As-tu d’autres idées qui pourr-
Ayame s’est brusquement interrompue, cessant de parler d’un coup sec.
Un frisson glacial parcourut mon corps, mes poils se dressèrent, et une sensation de chair de poule que je n’avais jamais connue auparavant m’envahit. Une vision terrifiante se dévoilait devant moi, ou plutôt une vision de ce qui allait bientôt se produire. Ayame et Midori étaient également silencieuses, car elles avaient elles aussi ressenti quelque chose. Au moment où elles se tournèrent, j’ai aussi posé les yeux sur la source de cette terreur qui s’emparait de moi.
Une immense armure mécanique d’une hauteur d’environ trois mètres s’écrasa sur le sol de la rue commerçante, rappelant la façon dont Superman atterrissait habituellement. Je pouvais également apercevoir plusieurs autres armures du même genre dans le ciel.
Les regards des habitants, ainsi que ceux de mes deux collègues, témoignaient clairement du fait que la situation n’était pas normale et qu’elle représentait un danger.
̶ MAMAN !
̶ OUI ! J’APPELLE LES CENTS !
Elles étaient prises de panique, ce qui était compréhensible. Face à ces monstres, que pouvions nous faire ? Je ne connaissais pas du tout leur puissance de feu ni leur technologie. S’attaquer à eux sans prendre de précautions risquait de me coûter cher.
Pourquoi voudrais-je me battre ?
Je me trouvais dans un état pessimiste, car j’avais momentanément oublié que je n’étais pas un simple homme. J’étais un surhomme, doté d’une source d’énergie différente de celle de ces habitants. J’étais convaincu que mes pouvoirs étaient supérieurs à ceux de ces machines.
Soudain, alors que ma confiance se rétablissait, mon cerveau semblait s’animer d’une réflexion plus intense que d’ordinaire. Une chaleur se propageait dans mon crâne et je réalisais que c’était grâce à la “Source” que ma compréhension était grandement accélérée.
̶ Ayame, pourriez vous me rassurer en confirmant qu’aucune population de ce monde ne maîtrise l’intelligence artificielle, n’est-ce pas ? Pas même au sein de ces machines ?
̶ Huu.. En effet, c’est un humain qui le contrôle.
̶ Tout ce que je voulais savoir.
Étant donné qu’il n’y a pas d’intelligence artificielle pour assister les pilotes de ces engins, il devrait être facile de s’occuper de ces individus. Les êtres humains commettent constamment des erreurs, surtout lorsqu’ils ont peur. Leur jugement se brouille et leur réactivité diminue.
L’armure en face de nous commençait à lever son bras en direction de la foule, qui restait figée par la peur. Sa paume se tendait, émettant une lueur croissante, suivie d’une onde de choc et d’un laser qui jaillissaient, constituant une attaque terroriste.
CHAPITRE 10 - MAGIE
J’avais réagi rapidement. Je m’étais élancé dans la direction de l’attaque en utilisant ma super vitesse, tout comme je l’avais fait auparavant. Le temps semblait se figer, rappelant l’instant sur le terrain d’athlétisme précédent, et en un clin d’œil, j’ai atteint l’endroit où le laser allait se poser. Sans même y penser consciemment, l’idée d’une barrière réflective m’est venue à l’esprit.
Ayant des connaissances préalables, je savais que dans mon monde d’origine, pour renvoyer un laser, on utilisait soit un miroir optique, soit certains cristaux spéciaux comme le rubis ou des revêtements particuliers. Je me suis dit que cela ne devait pas être si différent ici, donc j’ai envisagé une barrière de protection en forme d’hexagone fabriquée à partir de rubis. L’objectif était que le laser, une fois touchant ma barrière, puisse être renvoyé selon ma volonté.
J’avais simplement besoin de visualiser une image dans ma tête. J’ai imaginé une forme et un matériau pour celle-ci. Une fois que j’ai conçu le concept complet du sort, il s’est concrétisé et j’ai pu le lancer à ma guise. Bien sûr, il n’était pas si facile de réimaginer le processus de création de cette barrière, donc j’ai été obligé de lui donner un nom pour l’incanter. Les conseils de Midori concernant l’incantation étaient plutôt justes. Pour un sort basique, je n’en ai pas besoin, mais pour un sort spécifique qui demande du temps pour être imaginé et conçu mentalement, lui donner une incantation facilite l’apparition du sort.
J’ai réussi à déjouer le laser qui était dirigé vers les habitants et je l’ai renvoyé vers une autre armure. L’une des armures mécaniques dans le ciel a subi une explosion en étant touchée par le laser provenant de l’autre armure positionnée au sol. Ensuite, j’ai regardé les personnes derrière moi et les ai averties du danger. Beaucoup d’entre elles étaient figées et ne savaient pas comment réagir. Elles avaient besoin de quelqu’un pour les assister.
̶ COUREZ VITE ! METTEZ VOUS A L’ABRI !
À ma remarque, tous ont commencé à crier et à se disperser dans toutes les directions. Certains sont rentrés dans les bâtiments, tandis que d’autres ont couru loin, espérant échapper à la zone où le combat avait lieu.
̶ Alden, comment as-tu fait ça ? Tu sais aussi utiliser la magie de lumière ?
̶ Je vous expliquerai. Midori, Ayame. J’ai besoin de votre aide. Je ne suis pas sûr de pouvoir y arriver seul.
̶ Midori, vas-y, la magie et le combat, c’est ton domaine.
̶ Vas te cacher maman, je vais essayer d’aider Alden.
̶ Ayame, j’ai peur qu’un laser vous touche, alors voici pour vous.
Je dirigeais la paume de ma main vers la présidente.
̶ Barrière protectrice.
J’ai lancé une barrière similaire à celle que j’avais utilisée auparavant, mais cette fois-ci sous la forme d’une protection enveloppant le corps, telle un vêtement. Un halo lumineux rouge était relié à Ayame, la protégeant ainsi d’une éventuelle attaque laser. Elle se dirigeait vers l’échoppe de glace pour se mettre à l’abri.
̶ Midori, j’ai besoin de toi pour me faire voler. Tu sais utiliser la magie de vent ?
̶ Celle de Terre et de Vent sont mes éléments.
̶ Peux-tu me faire voler quand je te le dirais.
̶ Je suis prête.
L’armure devant moi a fait un geste en direction de ses collègues dans le ciel, qui se rapprochaient progressivement de notre position.
̶ Il doit faire partie des Cents, je vais l’attaquer, couvrez moi !
Les Cents ? Qu’est-ce que c’est ? Ayame les a mentionnés plus tôt. Est-ce la police locale ? Je n’avais pas le temps d’y réfléchir, car l’armure devant moi commençait à s’approcher de notre position. Elle se déplaçait rapidement, mais pas assez vite pour moi. Elle me lançait des lasers que je bloquais assez facilement, les renvoyant dans le ciel sans problème. J’ai activé la même barrière protectrice que celle d’Ayame, ce qui m’a offert une meilleure mobilité et m’a permis de m’approcher suffisamment près de l’armure pour lui asséner un coup de poing à pleine force.
Elle n’a pas résisté et un énorme trou béant s’est formé dans son torse, la propulsant sur des centaines de mètres devant moi.
̶ FEUUUUU !
Les armures au-dessus de nous étaient désorientées et avaient donné l’ordre d’attaquer. C’était le moment opportun pour les affronter à leur propre niveau.
̶ Midori, maintenant !
̶ Magie de vent : Bourrasque féerique !
De manière étrange, la force de la bourrasque était si intense que j’apercevais littéralement le mouvement de l’air. C’était une expérience incroyable. Habituellement, le vent est invisible, mais cette fois-ci, il était manifeste. Peut-être était-ce le flux de mana qui devenait visible.
Le sort se dirigeait vers mes jambes et je ressentais une sensation de légèreté. Lévitant dans les airs, j’étais légèrement désorienté, mais je réalisais que la bourrasque agissait comme un ressort, prête à me propulser. Je me positionnais comme si j’allais commencer à courir, en fixant l’une des armures mécaniques…
̶ Midori, vas-y !!
Soudain, le sort de Midori me propulsa dans les airs. J’ai rapidement compris l’acheminement de son sort et son concept, ce qui m’a permis de le reproduire à mon tour. En observant ses actions, j’ai réalisé que chaque fois que je voyais un sort être exécuté par l’un des habitants, je pouvais le reproduire immédiatement. C’était tout simplement incroyable, mais aussi déconcertant de voir à quel point cela était facile.
Je m’approchais de l’une des armures mécaniques, me préparant à frapper celle sur laquelle j’arrivais de toutes mes forces avec mon poing. Pendant que je chargeais mon poing droit, je parais les lasers avec ma main gauche, les frappant à différents endroits. Les décharges laser causaient des dommages aux bâtiments ou s’envolaient dans le ciel.
L’armure ne résista pas à mes attaques et fut complètement détruite. J’ai réussi à la retenir pour éviter qu’elle ne soit propulsée comme la précédente, utilisant plutôt son corps comme appui pour prendre l’avantage depuis une position plus élevée. En canalisant la Source dans mes jambes, j’ai pu effectuer un saut impressionnant, me visualisant équipé d’une lance en bois semblable à celle de Midori, mais avec l’élément feu. J’en invoquai deux dans mes mains et les lançai avec une vitesse fulgurante sur deux autres armures mécaniques qui n’eurent aucune chance d’échapper. Les lances les transpercèrent, les faisant chuter au sol.
Après ce coup, je pris conscience de ma grande force et de mes avantages. Je ne sais pas si c’est ma rapidité de compréhension ou l’influence de la Source qui me permettaient d’accomplir tout cela, mais rien ne pouvait me battre, du moins pas ces adversaires. Cela me faisait rire, mais surtout, cela me comblait de bonheur, car c’était exactement ce dont j’avais toujours rêvé. Être doté de superpouvoirs et combattre des ennemis. Cela peut sembler un peu enfantin, mais j’étais excité et totalement fan de cette situation. Je continuais de rire d’excitation tout en utilisant les bourrasques de vent pour me déplacer rapidement d’un point A à un point B, éliminant toutes ces armures. Lorsque j’étais suffisamment proche, j’utilisais mes poings ou mes pieds, et si l’armure était un peu éloignée, j’utilisais mes lances de feu.
̶ VITE ! TUEZ-LE !!!
Leurs formations défensives se désagrégeaient progressivement alors qu’ils étaient submergés par la peur. C’était là le problème de ne pas avoir d’intelligence artificielle dans ces machines, elles étaient sujettes à des défauts. Nous devrions envisager de développer nos propres machines dotées d’une IA, ce qui nous permettrait de nous défendre facilement contre ce genre d’ennemis.
Pour empêcher toute évasion due à leur peur, j’ai commencé à accélérer. En utilisant la Source dans mes jambes, je m’appuyais sur chaque armure détruite pour passer à la suivante. Lorsque je me propulsais, le temps semblait s’arrêter brièvement, comme lorsque j’utilise ma super vitesse. Cela me permettait de repérer rapidement les emplacements des ennemis pour les éliminer. Dans cet espace figé et paisible, chaque coup que je portais me faisait rire et me donnait un sentiment de liberté face à un monde où je suis invincible.
CHAPITRE 11 - CENTS
J’avais cette sensation d’être de nouveau transporté dans un autre monde, un silence absolu, sans aucun signe de vie. L’effervescence d’une rue commerçante, suivie de la détresse des gens, s’est estompée au fil du combat. Je tremblais d’excitation, ou peut-être à cause de la pression qui s’était dissipée après avoir remporté la bataille. Je me suis assis sur le sol, soulagé, sur le bitume, afin de reprendre mon souffle après le combat. Je contemplais le ciel qui m’était désormais accessible.
̶ Alden.
Je me sentais distrait pendant ma pause, interrompu par Midori. Ayame commençait à sortir de sa cachette pour se joindre à nous. J’avais levé ma protection sur elle, car elle n’en avait plus besoin.
̶ Tu nous dois des explications.
En entendant le ton d’Ayame, j’ai réalisé qu’elle désirait plus que de simples explications. Comment était-il possible pour un être humain d’utiliser la magie aussi naturellement, en la copiant simplement en l’observant ?
̶ Comment vous expliquez, c’est un peu-
Soudain, trois individus surgirent des bâtiments, évoquant les Yamakasi. Leur aisance dans leurs déplacements était impressionnante. Je fus grandement surpris par leur arrivée et me mis en garde, car je ne pouvais pas déterminer si l’ennemi se limitait uniquement à ces machines.
Je retirai ma casquette et mes lunettes, car le combat m’avait fait transpirer. Dès que je les enlevai, je ressentis une hostilité démesurée envers les trois individus. Leurs attaques pleuvaient sur moi. Ils se dispersèrent pour bloquer tous mes angles. Leurs mouvements étaient synchronisés à la perfection. Mais face à un ennemi comme moi, ce ne serait pas facile pour eux. Ils me lancèrent des armes inconnues, mais ma seule option était d’activer une sorte de bouclier. Dans ma tête, je visualisais des murs en bois qui se dressaient pour contrer leurs attaques. Leurs armes se fichèrent dans les murs, les brisant, mais m’empêchant d’être touché.
̶ STOP ! C’EST UN ALLIE !
Ayame poussa un cri perçant, qui stoppa net leurs attaques.
̶ Je dois avouer, vous êtes tout simplement incroyable ! Vous attaquez sans relâche tout ce qui sort de l’ordinaire. Je vous ai déjà dit d’arrêter, mais semble-t-il que le message n’ait pas fait son chemin dans votre système !
̶ Désolé Présidente !
̶ Je vous l’avait dit qu’il fallait attendre, Ku, Mashiya !
̶ Tu ne nous as rien dit Ryota, après tout, même toi t’était sceptique en voyant cet homme.
Leur regard était rempli d’intrigue lorsqu’ils me fixaient.
̶ Permettez-moi de vous présenter Alden Rossi, une personne d’une origine plutôt complexe. Il provient en effet d’un autre monde, ce qui explique les différences physiques qu’il présente par rapport à nous.
Je me suis courbé respectueusement devant eux pour leur adresser mes salutations.
̶ Je suis ravi de faire votre connaissance. En effet, je ne suis pas originaire de cette planète, ce qui explique votre réaction, bien que celle-ci ait été quelque peu exagérée.
̶ Ah oui, enchanté. Je suis Ryota, voici Ku et Mashiya. Nous faisons partie des Cents.
Mon regard était fixé sur Ayame, qui avait su déchiffrer ma question en lisant dans mes yeux.
̶ Alden, laisse-moi te parler des Cents. Il s’agit d’une organisation que nous dirigeons, une sorte de milice composée des meilleurs combattants du Royaume. Leur mission principale est de protéger la population contre des situations telles que celle que tu viens de rencontrer. En plus de cela, ils effectuent des missions à l’extérieur et s’engagent dans diverses activités liées à la protection du Royaume.
̶ Une police supplémentaire ?
̶ En effet, c’est exact. Les membres des Cents jouissent d’un grand respect de la part de la population, car ils sont très médiatisés. Ils sont considérés comme des célébrités et il est essentiel que leur image soit toujours impeccable, à la fois pour notre entreprise et pour leur propre carrière. En plus de leur salaire, ils ont également le droit de gagner beaucoup plus grâce à des contrats de partenaires avec les marques, des apparitions publicitaires et bien d’autres opportunités.
̶ Ils font du show-business en fait ?
̶ Du quoi ?
̶ Ils peuvent être dans l’industrie du spectacle.
̶ Oui, tout à fait.
̶ Et en cas de situations où ils arrivent un peu tard, sont-ils sanctionnés ?
̶ QUOOOI ?
Les trois étaient furieux. C’était compréhensible, car ils étaient responsables de leur retard. J’avais eu le temps de m’occuper de tous les ennemis avant leur arrivée. Ils m’avaient même attaqué sans avertissement, et je doute qu’Ayame laisse cela passer sans réagir.
Je la voyais soupirer.
̶ Tu anticipes déjà, Alden. Je vais prendre en charge cette situation.
̶ Présidente ! Vous nous avez appelé il y a 10 minutes. Le temps de venir…
̶ Nous aborderons cette question lors de notre séance de débriefing. Pour l’instant, nous devons nous concentrer sur la situation actuelle. Vous vous occupez des machines, nous allons les envoyer aux laboratoires.
̶ Oui, Présidente !
Ils se dispersaient habilement et géraient facilement les suites du combat. C’était vraiment une entreprise incroyablement bien organisée.
̶ Alden, nous continuerons notre discussion demain. Je pense qu’il serait préférable que tu rentres dans ta suite. Prends du repos, la journée a été longue.
̶ Vous n’avez pas besoin d’aide ?
̶ Ne t’inquiète pas. Il vaut mieux que tu ailles te coucher tôt. Demain, nous avons rendez-vous au château, n’oublie pas.
̶ C’est bien noté. Je vais faire ça.
̶ Midori, accompagne Alden. J’ai encore du boulot.
Ayame avait raison. Après tout, j’avais passé toute la nuit précédente sans dormir, et la fatigue commençait à se faire sentir. J’ai vraiment besoin de dormir, c’est indispensable.
Nous avons pris un taxi avec Midori pour rentrer à l’entreprise. J’ai vraiment passé une journée incroyable aujourd’hui. Depuis hier, cela semble interminable. Cette sensation d’avoir vécu pendant des jours alors que ce n’est qu’une journée peut être éprouvante pour mon état mental.
C’est en entrant dans ma suite que je réalisais la chance que j’avais et découvrais le lit incroyable qui m’attendait.
CHAPITRE 12 - DREAM
Au départ, une voix m’appelait doucement, presque imperceptible, ce qui ne me perturbait pas du tout. Peu à peu, son intensité augmentait jusqu’à devenir très clairement audible. Cela me réveillait, me faisant ouvrir les yeux, mais je me trouvais dans un lieu totalement inconnu. C’était comme une scène irréelle : une plateforme spatiale où je pouvais respirer normalement. De là, je pouvais observer la Terre au loin et sentir les rayons du soleil caresser mon visage, une chaleur apaisante m’enveloppant.
̶ Ce n’est pas la réalité ça.
̶ En effet, c’est un rêve.
La voix surgit soudainement derrière moi, sans personne en vue quelques instants auparavant. Cette situation ne pouvait être que le fruit de mon imagination, un rêve, car nul ne peut respirer dans l’espace. Pourtant, ce rêve est étrange, car je ne reconnais ni cette personne ni cet endroit. Normalement, les rêves sont composés d’éléments que l’on a déjà vécus ou vus, mais tout ceci m’est totalement étranger.
̶ Il est normal que tout ceci te semble étrange, car c’est moi qui me suis invitée dans tes rêves.
Elle a pu lire dans mes pensées ?
̶ Tout à fait, à l’heure actuelle, j’utilise toute ma puissance pour communiquer avec toi. J’ai espéré venir plus tôt, mais je n’y suis pas parvenue la nuit dernière.
̶ Je n’ai pas dormi, j’ai passé une nuit blanche. Mais qui êtes-vous ?
̶ Je suis Tellus, la Déesse de la Terre. Pour être précise, je suis ta divinité.
̶ Mais ma divinité n’est pas censée être une figure âgée avec une barbe blanche ?
̶ Je ne pourrais pas mieux décrire ce qui est dit sur Terre. Mais compte tenu des événements récents, es-tu encore capable d’être surpris ?
Ces deux derniers jours et mon invocation m’ont ouvert les yeux sur l’extraordinaire, rendant tout ce qui en émane peu incroyable. Je ne m’attendais pas à rencontrer le Dieu de la Terre sous les traits d’une femme, ou plus précisément d’une jeune fille. Elle n’était pas très grande, avec de doux cheveux châtains clairs et des yeux d’un bleu intense, rappelant l’océan de ma planète, comme si l’eau de la Terre, venait de ses yeux. Elle portait une tenue religieuse et divine, qui ajoutait à son aura apaisante et respectueuse. Son voile couvrait une partie de ses cheveux, laissant apparaître un visage parfait, sans défauts, qui m’attirait irrésistiblement au respect.
̶ Vous me surveillez ?
̶ Tout à fait, de temps en temps. Tu n’aurais jamais dû être invoqué dans un autre monde, donc il est normal que je vérifie ce que mon habitant fait.
̶ Je n’aurais jamais dû ? Même une déesse ne peut pas empêcher une invocation dans un autre monde ?
̶ C’est compliqué, la technologie utilisée a surpassé nos pouvoirs. C’est une première. Même si nous pouvions intervenir, il existe des règles entre les dieux. Je ne peux rien faire d’autre que te soutenir et te donner des pouvoirs.
̶ Donc, c’est vous qui m’avez donné mes pouvoirs ?
̶ Pour l’instant, je ne t’ai encore rien donné.
Il est étrange que je puisse utiliser la “Source”, alors si ce n’est pas ma propre Déesse qui a employé mes pouvoirs, comment les ai-je obtenus ?
̶ Que me voulez-vous ?
̶ Je suis venu m’excuser de n’avoir rien pu faire, tout est arrivé si soudainement.
̶ Avec tout votre respect, les excuses ne changent rien. J’ai perdu ma famille et tout ce que j’avais construit sur Terre a disparu, comme si je n’avais jamais existé. Je crains que ma famille soit dans une situation difficile.
̶ Je vais être honnête avec toi et mes excuses ne seront pas de simples paroles, mais des actes.
̶ Des actes ?
̶ Ton invocation a perturbé mes plans pour cette planète. Je l’avais laissée à l’abandon, et la situation était devenue critique en raison de la surpopulation, des problèmes politiques et environnementaux. C’était toi qui étais censé changer tout cela.
̶ Moi ? N’importe quoi, je suis seulement informaticien.
̶ En réalité, j’allais te faire gagner une énorme somme d’argent à la loterie. Ton destin était prévu pour que tu utilises cet argent pour créer et améliorer une intelligence artificielle au sein de ton entreprise. Cela aurait entraîné une révolution technologique sur la planète et t’aurait ouvert les portes de la politique. Tes idées et ta vision bienveillante auraient pu grandement améliorer le quotidien des habitants de la Terre.
Ses paroles étaient captivantes, mais j’avais du mal à y accorder pleine crédibilité. Une destinée prévue spécialement pour moi, aussi incroyable que cela puisse paraître, semblait presque trop beau pour être réel.
̶ On dirait que votre projet est tombé à l’eau.
̶ M’en parle pas, j’ai envie d’intervenir dans le monde d’Izanagi, mais cela risquerait de déclencher une guerre.
Je pouvais voir à quel point elle était exaspérée et sincèrement troublée par cette situation.
̶ Même si je vous crois, je ressens quand même une certaine amertume.
̶ Je suis profondément désolé, Alden. J’ai besoin de toi pour la suite des événements, et nous allons tirer parti de cette situation. Je te promets une chose, tu retrouveras ta famille. Tout d’abord, j’utiliserai tous mes pouvoirs pour figer le temps sur Terre, juste au moment où tu as été invoqué.
̶ Vous en êtes capable ?
̶ Tant que c’est sur ma planète, je le peux, mais il y aura une contrepartie, bien sûr.
̶ Quelle est cette contrepartie ?
Elle ne me répondait pas directement, mais observait attentivement la planète Terre derrière moi.
̶ Une fois que j’aurai figé la planète, tu pourras continuer à vivre dans le monde où tu es actuellement. Si tu viens à mourir, tu reviendras dans ton corps sur ta planète d’origine, juste avant ton invocation. Cependant, je te déconseille fortement de te suicider, car tu devrais profiter de cette vie comme si c’était ta première existence, en tirer des expériences et devenir plus fort. Quand tu décideras de passer l’arme à gauche, tu réintègreras la Terre en tant que Terrien.
̶ Vous dites que c’est si simple pour vous de faire ça ? Revenir sur ma planète est tentant.
̶ Tu es mon enfant, et je te connais très bien. J’ai pu sonder toutes les facettes de ta vie, et je t’ai choisi pour une raison bien précise. Je sais que tu te plais déjà dans ce monde et que tu t’y plairas encore davantage.
J’étais déconcerté par sa capacité à comprendre les profondeurs de mon être. En effet, le combat que j’ai mené tout à l’heure a été l’événement le plus agréable de toute ma vie. Je me sens invincible avec tous ces super-pouvoirs, et j’irais presque jusqu’à tout sacrifier pour les avoir sur Terre.
Elle a totalement raison concernant l’opportunité que représente cette vie comme un tremplin pour ma seconde existence après ma mort.
C’est une chance inouïe qui ne se présente à personne.
J’apprécie énormément ma vie sur Terre, j’aime profondément ma famille et ma fiancée, mais si le temps est figé et qu’ils ne sont pas affectés par ma disparition, alors ma tristesse de les avoir abandonnés et de les voir vivre leur vie sans moi s’estompe peu à peu. À la place, je suis déterminé à les retrouver une fois ma quête accomplie.
̶ Tes yeux ont changé, Alden. C’est ce regard que j’apprécie chez toi. Je crois que tu as pris ta décision.
̶ Déesse Tellus, je suis entre vos mains pour la suite des évènements.
̶ Parfait. Je vais te transmettre une partie de mon pouvoir. Tu pourras parler couramment le japonais, et je te confère également un peu de ma magie. Celle-ci te permettra d’utiliser la magie de la planète. Sans ce don, il serait difficile de survivre dans ce monde. Sache qu’il y a une particularité. La magie que je te transmets est d’essence divine. Cela signifie que tu risques de vivre plus longtemps, voire beaucoup plus longtemps qu’un être humain normal. Selon comment tu maîtrises cette magie, il te sera même possible d’atteindre l’immortalité. Cependant, garde à l’esprit que cela ne te rendra pas invincible.
̶ Est-ce que cela ne serait pas contradictoire si je souhaite retourner sur Terre ?
̶ Ne t’en fais pas, j’ai confiance, je sais que tu trouveras une solution. Mais il est vrai que si tu fondes une famille ou te fais des amis ici, il est probable que tu les verras vieillir et mourir.
̶ Pour l’instant ce n’est pas ma préoccupation.
̶ C’est toujours bien de relativiser, j’apprécie cette attitude. Quant à nous, nous nous reverrons dans plusieurs siècles. C’est le prix à payer pour que j’utilise toute ma puissance divine afin de contrôler le temps de la planète pour toutes les formes de vie. M’accorder en plus un cadeau de départ affaiblit davantage mes forces. Donc, je récupérerai une partie de ma puissance d’ici quelques siècles. Nous nous retrouverons lorsque tu reviendras sur Terre. Je te le promets.
̶ Tout ça pour moi, je ne sais pas comment vous remercier.
̶ Il n’y a pas besoin de remerciements. Ce sont mes excuses, exprimées à travers des actes.
Ma vision s’obscurcit progressivement, comme si le sommeil m’envahissait. La silhouette de Tellus se brouilla, mais son sourire fascinant et chaleureux demeura. C’était comme si ma propre mère me souriait.
̶ J’ai l’impression d’abuser de votre gentillesse, je ne vous décevrai pas.
J’avais tant de choses à lui dire, tant de questions sur l’existence, mais ce rêve fut trop court, bien trop court.
̶ Va, Alden ! Nous reparlerons dans cinq cents ans autour d’une tasse de thé.
Je m’évanouis et me réveillai à nouveau, mais cette fois dans mon lit. L’horloge digitale sur la table de chevet indiquait 9 heures du matin…
CHAPITRE 13 - ROYAUME
J’étais complètement désorienté, comme si j’avais dormi pendant des jours entiers. Était ce réellement un rêve ou plutôt une manifestation divine ? Pour le découvrir, je n’avais qu’une seule option : retirer l’oreillette de traduction de mon oreille. Aucune différence ne me parvint. Mon cerveau maîtrisait désormais parfaitement la langue japonaise, comme si c’était ma langue maternelle. L’écriture était fluide. J’avais véritablement acquis le japonais en une seule nuit.
̶ Donc c’était bien réel.
En effet, c’était bel et bien une apparition divine, et le pouvoir qu’elle m’avait conféré était maintenant mien. J’essayais d’utiliser ma “Source”, mais quelque chose clochait. Je ressentais une autre forme d’énergie, en plus de la Source. Le concept était identique, mais cette nouvelle énergie n’était pas aussi chaleureuse. Elle me rappelait plutôt une fraîche brise, apaisante lorsque l’on a chaud. C’était donc ça, le mana.
Finalement, j’avais la capacité d’utiliser des sources d’énergie indépendantes les unes des autres.
̶ Cela ne ferait pas de moi quelqu’un d’inépuisable ?
C’était une question que je devais sérieusement considérer.
À présent, je ne savais pas d’où venait cette mystérieuse “Source”, contrairement au mana qui m’a été donné par Tellus. Cela signifiait que je pourrais passer plus inaperçu en m’intégrant parfaitement parmi les habitants, car j’en faisais désormais partie intégrante.
Dans un état d’excitation, je prenais ma douche, empli de joie. Une bonne nuit de sommeil m’avait totalement revigoré, me préparant ainsi à rencontrer la Princesse. Il était essentiel pour moi de faire bonne impression afin de pouvoir vivre paisiblement ici. J’enfilais le costume que nous avions acheté hier dans les boutiques, me trouvant véritablement remarquable. Grâce à la “Source”, je n’avais plus d’impuretés sur le visage et mon physique s’était amélioré, ce qui me donnait une confiance en moi renouvelée. C’était certainement bénéfique pour mon état d’esprit.
Au moment où je m’apprêtais à quitter ma chambre et rejoindre le hall, j’ai remarqué que quelqu’un se tenait derrière la porte. Apparemment, elle faisait partie du personnel ici, mais nous ne nous étions jamais rencontrés auparavant.
̶ Bonjour, Monsieur Rossi, je suis l’assistante de la Présidente. Je vous apporte votre tenue pour l’audience avec la Princesse.
̶ Ma tenue ? Mais ce n’est pas ce costume là ?
̶ Absolument pas. Lorsqu’on assiste à une audience avec la royauté, il est essentiel de respecter les traditions vestimentaires en vigueur.
̶ Je vois, cette tenue à l’air complexe.
̶ On m’a dit de vous aider pour cette première, car en effet ce n’est pas facile au début.
̶ Merci de votre patience.
Heureusement, son aide était précieuse, car en effet, la tenue était typique d’un noble issu d’une famille royale dans mon monde. Chaque détail devait être impeccable et sans défaut. Une fois habillé, j’avais l’impression d’être un haut gradé militaire. Le blanc de la tenue contrastait magnifiquement avec mes cheveux blonds et mes yeux bleus. Les touches de bleu sur les coutures et la ceinture s’harmonisaient parfaitement avec le reste de la tenue, créant un ensemble d’une élégance splendide.
̶ C’est bon, ça me va bien ?
Je me tournai vers l’assistante qui était figée, la bouche légèrement ouverte, en regardant mon torse.
̶ Allo, il y a quelqu’un ?
̶ Excusez-moi ! Toutes mes excuses, oui ça vous va très bien. Vous êtes incroyable. Maintenant, je vous invite à me suivre jusqu’à la voiture qui vous conduira à votre destination.
Elle marchait à mes côtés en direction de la sortie de l’entreprise. Comme d’habitude, tous les regards étaient tournés vers moi, l’ensemble du personnel me scrutait, mais cette fois-ci plus intensément que d’ordinaire. Probablement à cause de ma tenue inhabituelle.
Une fois installé dans la voiture, une sensation de nervosité me saisit. C’était une émotion que je n’avais pas ressentie depuis que j’avais été invoqué, et j’étais heureux de m’en être débarrassé. Cependant, cette rencontre avec la princesse allait marquer un tournant décisif dans cette nouvelle vie que j’avais embrassée.
L’assistante m’instruisait sur les protocoles à suivre et les paroles à prononcer lors de mon passage à l’audience. Les procédures royales dans ce monde étaient différentes de celles que j’avais connues auparavant, mais cela était compréhensible, étant donné que nous n’avions plus de gouvernement monarchique dans mon monde d’origine.
̶ C’est bon, vous avez tout retenu ?
̶ Aucun problème pour moi.
Au fur et à mesure que nous approchions, nous découvrions peu à peu le château. L’immensité du château vu de la tour de Kanegawa Industries était tout simplement incroyable, mais vu de si près, c’était un monument inimaginable sur Terre. Ce château semblait être un pays à part entière, car il paraissait infiniment grand, ce qui semblait impossible.
Nous nous arrêtâmes devant les imposantes portes d’entrée. L’assistante abaissa sa fenêtre et présenta aux gardes notre autorisation. Le portail s’ouvrit majestueusement, dévoilant un vaste chemin devant nous. À partir de cet instant, nous devions parcourir plusieurs kilomètres en voiture pour atteindre le sommet du château. Étant le bâtiment le plus élevé du pays, il était situé au-dessus d’une plateforme, ce qui semblait incroyablement aménagé. La réalisation d’un tel édifice était impensable sans l’aide de la magie.
Au sommet des marches de l’entrée principale du château, se tenait Ayame. Lorsqu’elle nous a repérés, elle nous a fait signe de nous approcher. Nous avons été déposés au pied des escaliers. En sortant du véhicule et levant les yeux vers le ciel, je me suis rendu compte que la taille de ce château était véritablement impressionnante, car je ne pouvais même pas en voir la fin.
On risquerait de finir avec un “torticolis chronique” à force de le dévisager ainsi.
̶ Par ici Alden !
̶ Bonjour Ayame, vous avez l’air en forme.
̶ Absolument, je suis pleine d’énergie ! C’est une grande nouvelle que tu fasses officiellement partie de notre pays. Je suis vraiment enthousiasmée par cela !
Depuis le début, elle a été incroyablement chaleureuse envers moi. Je me sens presque comme son fils, une sensation étrange mais plutôt agréable.
̶ Prêt Alden ?
̶ Pas le choix de l’être.
Alors que nous entrions enfin dans le bâtiment pour participer à l’audience, j’ai ressenti une montée de stress similaire à celle que l’on éprouve lors d’un entretien d’embauche.
C’est mon moment, je ne dois pas le foirer.
CHAPITRE 14 - CITIZEN
Mon cœur battait la chamade alors que je pénétrais dans la somptueuse salle de l’audience royale. J’étais émerveillé par le décor mélangeant culture japonaise traditionnel, ainsi que royauté médiéval. Ce qui m’entourait étaient : des colonnes majestueuses qui s’élevaient vers les hauteurs, des lustres scintillants projetaient des éclats de lumière dorée, et des tapisseries richement ornées habillaient les murs. Chaque détail était empreint d’une grandeur et d’une élégance que je n’avais jamais imaginées auparavant.
Au centre de cette splendeur, trônait la princesse du pays, une vision de grâce et de beauté. Vêtue d’une robe étincelante aux couleurs sombres, elle rayonnait d’une aura douce. Mes mains étaient moites, et mes pas hésitants, car jamais je n’avais côtoyé une telle noblesse auparavant. Comment pourrais je me comporter avec aisance en présence d’une personne si prestigieuse ? C’était une jeune femme japonaise typique, avec des cheveux noirs et des yeux noirs, incarnant parfaitement la beauté du peuple Yamato.
En respectant les instructions de l’assistante que j’avais reçues dans la voiture, je m’agenouillais et posais un genou au sol, tout en fermant le poing en signe de salutation envers celle qui m’avait convié. Malgré cela, je n’avais pas encore eu le courage de rencontrer le regard de la princesse, préférant garder les yeux rivés sur le sol, étant toujours très nerveux face à la situation.
Mais je ressentais dans la salle, l’atmosphère qui était tout aussi tendu. Les nobles, vêtus de leurs habits les plus somptueux, échangeaient des chuchotements emplis de mystère.
J’ai pu pleinement saisir la situation, comme je l’ai toujours affirmé dès le début. Pour les habitants de ce monde, je suis perçu comme un extraterrestre, le fruit réussi d’une expérience lors de leurs tests scientifiques. Pour les plus nobles d’entre eux, je ne serais peut-être pas considéré comme l’un des leurs. Je prends de plus en plus conscience que ma situation se complexifie et risque de devenir bientôt politique.
Lorsque la princesse posa les yeux sur moi, je sentis un frisson parcourir mon échine. Je m’inclinais humblement à nouveau, cherchant à exprimer mon respect et ma gratitude pour cette opportunité exceptionnelle.
Ayame posa sa main sur mon épaule tout en saluant également. Son geste signifiait clairement : « Allez, lance-toi ! ».
̶ Je suis Alden Rossi, et je me présente en réponse à la convocation de Sa Majesté, la Princesse Miki Kiyomi !
Après que j’eus fait mes présentations, tout devint officiel ; les chuchotements et les mystères disparurent, laissant place à l’audience tant attendue.
̶ Bienvenue, Alden Rossi, dans le Royaume d’Himeji ! Je suis ravie de vous accueillir dans ce monde, et particulièrement dans notre pays. C’est une chance de vous avoir parmi nous !
Lorsque la princesse s’adressa à moi, sa voix était douce et mélodieuse, comme une brise légère qui caressait délicatement mes oreilles. Elle me salua chaleureusement, manifestant une curiosité bienveillante envers ce visiteur inattendu que je suis, venu d’un autre monde.
̶ Je suis la Princesse Miki Kiyomi, souveraine de ce royaume. Vous pouvez relever la tête. Les présentations sont maintenant terminées.
Elle se leva de son trône, les yeux brillants d’étoiles. Elle était radieuse, et je pouvais sentir sa fascination pour moi, tout comme je suis fasciné par elle. Cependant, dans la salle, tout le monde n’avait pas la même lueur d’étoiles dans les yeux. Certains étaient emplis de doutes et de jalousie. Je suis persuadé que cette audience va être très longue.
̶ Aujourd’hui, je vous ai convoqué officiellement, mais également dans le plus grand secret, pour plusieurs raisons. Tout d’abord, au nom du Royaume et de mon peuple, je tiens à présenter mes excuses pour vous avoir involontairement invoqué. Je ne pourrais jamais pleinement comprendre le désarroi que vous ressentez, et encore moins la colère d’avoir tout perdu.
Son ton de voix était empreint de compassion. Elle reconnaissait qu’ils avaient commis une erreur, que cela n’était pas prévu. Ma colère s’est estompée, mais je pourrais toujours leur reprocher cette situation, et ils ne pourraient rien dire en retour. Cependant, ce n’est plus mon intention aujourd’hui, mais je suis content qu’ils en prennent conscience.
̶ En effet, votre invocation est complètement due au hasard, car la technologie qui était censée vous invoquer ne devait en aucun cas fonctionner. Mais dans votre malheur, nous avons réussi une prouesse technologique et scientifique hors du commun !
Je le vois venir gros comme une maison…
̶ En outre, j’aimerais compenser cet accident en vous offrant plusieurs choses. Bien entendu, rien ne pourra remplacer la perte de votre famille et des années passées dans votre monde. Cependant, j’espère vous offrir une vie aisée en tant que citoyen du Royaume d’Himeji.
Un serviteur à ses côtés lui tendit une tablette holographique et la princesse commença à lire ce qui était écrit dessus.
̶ Alden Rossi, à partir d’aujourd’hui, je vous accorde l’immunité politique ! Vous ne pourrez être poursuivi, recherché, arrêté, détenu ou jugé en raison de vos opinions ou actes dans notre Royaume. Cependant, cela ne s’applique évidemment pas aux cas de terrorisme, de meurtre ou d’actes compromettant la sécurité nationale !
La salle devenait de plus en plus bruyante, ce qui était compréhensible étant donné que l’octroi d’une immunité politique à un citoyen était sans précédent. Cela signifiait que je pouvais potentiellement commettre des actes agressifs dans la rue sans être inquiété. Ayame me regardait avec des yeux perturbés.
Elle semble croire que je ne suis pas surpris ? Eh bien si, autant qu’elle pourtant.
̶ Vous recevrez chaque mois une compensation financière en tant que “sinistré hors sol”. C’est un nouveau terme que nous avons créé pour désigner votre cas, celui des individus venant d’un autre monde invoqué par accident. Vous percevrez un montant mensuel d’un million de yens.
UN MILLION ?!
Dans mon monde, il s’agit d’un peu plus de six mille euros. Ils m’offrent cette somme chaque mois ? Je réalise mieux ce que la princesse voulait dire quand elle disait qu’elle voulait que je vive confortablement.
̶ Bien sûr, en tant que citoyen à part entière du Royaume, vous bénéficiez de tous les avantages réservés aux habitants du Royaume.
Elle omet de mentionner également ses désavantages.
̶ Par ailleurs, je tiens à exprimer ma gratitude pour votre acte de bravoure lors de l’attaque terroriste en ville hier ! Peu de citoyens seraient capables de risquer leur vie pour sauver celle des autres, et encore moins de faire face à tant d’ennemis seul. En reconnaissance de votre courage, nous avons décidé de vous accorder une compensation financière supplémentaire qui sera discrètement versée sur votre compte.
Elle doit être tellement haute, qu’elle ne peut pas le dire à voix haute.
̶ Voici la situation concernant l’aspect officiel. Passons maintenant à la deuxième partie de l’audience.
La princesse levait sa main et faisait un geste en direction de la salle. Tous les nobles présents commençaient alors à se retirer, ne restant que Ayame, les gardes, la princesse et trois autres personnes, probablement des membres très proches de la princesse. Je ne comprends pas pourquoi tant de formalités étaient nécessaires pour que le reste de l’audience disparaisse.
̶ Ayame, ça fait plaisir de te voir.
̶ Moi de même Kiyo. Ça fait longtemps.
Hein ? Comment a-t-elle été appelée ?
̶ Midori, comment vas-t-elle ? Elle me manque.
̶ Parfaitement bien, elle me parle tout le temps de vouloir te voir.
̶ J’en suis désolée, c’est trop compliqué.
Qu’est-ce que c’est que ce ton très familier ? Où est le discours royal, sérieusement ?
Je regardais Ayame avec désarroi. Elle avait tout compris de ma question rien qu’à travers mon regard. La princesse et Ayame se regardèrent alors et éclatèrent de rire.
Elle se moque de moi…
̶ Alden. La princesse est la fille de mes défunts amis, les anciens souverains, qui sont malheureusement décédés prématurément. Nous aurions actuellement le même âge. Midori et Kiyo, qui sont également du même âge, ont joué ensemble quand elles étaient petites. Maintenant, tu comprends pourquoi nous avons une connexion particulière ?
Je n’arrivais pas à comprendre à quel point Kanegawa Ayame était importante et quel statut elle occupait dans ce Royaume. C’est tout simplement incroyable. Je me demande même si mon invocation, malgré ce que m’a dit Tellus, ne faisait pas partie de ma destinée…
CHAPITRE 15 - CITIZEN 2e partie
J’avais un grand nombre de questions à lui poser, mais je devais attendre le moment opportun. Ayame et la princesse conversaient comme si elles n’avaient pas eu de rencontres depuis longtemps. Le rôle de la princesse était plutôt délicat pour maintenir des liens avec les personnes qu’elle connaissait en dehors de son château. Elle pouvait facilement effectuer des appels en visioconférence sans problème, mais pour des raisons de sécurité, elle était contrainte d’organiser des audiences afin de dialoguer avec les individus les plus proches se trouvant à l’extérieur du château.
Ayame posait ses yeux sur moi, esquissant un sourire léger.
̶ Je pense que nous devrions parler d’Alden.
̶ En effet, Ayame. Abordons maintenant les questions importantes.
Ça y est, c’est le moment.
̶ Alden, y a-t-il des interrogations que vous souhaiteriez formuler ? En effet, l’octroi de la citoyenneté trouve sa justification dans certaines considérations.
̶ Le citoyen jouit de droits, toutefois, il est également investi de responsabilités. Sachant votre orientation politique de type monarchique, il est fort probable que vous envisagiez de solliciter mon concours en vue de votre situation politique, notamment en raison de l’attaque terroriste.
Un regard de méfiance de la part de la princesse était dirigé en direction d’Ayame.
̶ Je n’ai même pas abordé ce sujet avec lui, je t’assure. Je t’ai déjà dit à quel point il est perspicace et intelligent.
Je remarquais que la princesse soupirait, mais c’était un soupir empreint de soulagement.
̶ Je vois que vous avez compris ce que j’avais en tête.
̶ Cela relève de la logique élémentaire. Étant donné le pouvoir dont je dispose, ce serait une erreur de ne pas l’exploiter. J’aurais agi de la même manière.
̶ Je suis apaisé de constater que vous saisissez ma situation.
̶ Je la comprends, mais pour que je l’accepte. J’ai deux conditions.
̶ Seulement deux conditions ? Si elles sont réalisables de mon côté, je les accepte volontiers. Votre assistance mériterait un prix bien plus élevé. Je vous écoute attentivement.
̶ Dans un premier temps, j’aspire à obtenir une connaissance exhaustive de votre contexte politique. Je désire comprendre les tenants et aboutissants de mon engagement, ainsi que les moyens par lesquels je pourrais vous apporter mon soutien.
̶ Je vais expliquer clairement notre situation. Voici ce qu’il en est.
La princesse m’a partagé des informations sur la situation de son pays ainsi que sur celle du monde en général. Cependant, le principal souci réside dans les relations avec le pays voisin, le Royaume d’Ezo. Selon la princesse, notre propre royaume, Himeji, a toujours adopté une approche gouvernementale axée sur la proximité avec le peuple, en garantissant des libertés individuelles, une économie stable et équitable, ainsi que la sécurité. Notre nation a constamment été un modèle à suivre pour les autres pays. Notre réputation est renforcée non seulement par notre maîtrise remarquable de la magie, mais également sur le plan technologique grâce à Kanegawa Industries, qui a précédé d’autres royaumes en matière d’innovations. En tant que leader monopolistique, Kanegawa fournit ses produits à travers le monde.
Depuis environ cinquante ans, le Royaume d’Ezo a adopté une approche expansionniste, sous la gouvernance de factions autoritaires et oppressives. Leur objectif est d’élargir leur emprise territoriale dans le but d’accumuler richesse et influence. Cette nation s’est lancée dans le développement d’une technologie avancée qu’elle souhaite déployer non seulement au sein de sa population, mais également à l’échelle mondiale. Malgré la présence de la magie dans leur royaume, celle-ci est employée de manière à exercer un contrôle oppressant sur les citoyens.
Les origines du conflit entre Himeji et Ezo résident dans leurs divergences idéologiques profondes ainsi que dans leurs aspirations contradictoires. Les frictions ont atteint un point critique lorsque Ezo a tenté d’exercer des pressions sur Himeji en vue d’établir des liens plus étroits et d’obtenir un accès aux ressources technologiques fournies par Kanegawa Industries, afin de compléter leur propre technologie avancée.
Himeji ayant refusé de coopérer avec un régime tyrannique. La princesse craint que le partage de leur technologie et de leur magie ne conduise à une utilisation abusive par Ezo, mettant en danger la liberté et le bien-être de leur peuple, ainsi que du monde entier.
Le Royaume d’Ezo, considérant le Royaume d’Himeji comme un obstacle à ses visées hégémoniques, a commencé à disséminer de la désinformation visant à décrédibiliser le pays. Cette campagne a débuté en ciblant en particulier l’intelligence artificielle. Cette situation engendre des problèmes politiques et entrave la progression d’Himeji. À l’échelle mondiale, l’idée fausse prévaut que le Royaume d’Himeji cherche à dominer le monde par le biais de sa technologie, alors qu’en réalité, c’est Ezo qui pose problème. Cette désinformation semble être utilisée pour justifier une éventuelle intervention militaire, en arguant que la technologie et la magie d’Himeji pourraient représenter une menace pour la sécurité régionale.
Le Royaume d’Himeji prend des mesures pour éviter l’utilisation de l’IA dans le pays, ou du moins pour la limiter, dans le but de contredire les affirmations d’Ezo. Pourtant, notre nation posséderait un potentiel considérable pour révolutionner le monde grâce à cette technologie. D’autres pays sont en retard et pourraient ne jamais parvenir à un tel niveau d’avancement.
Je comprends mieux ce que voulait dire Ayame hier.
Cette audience royale m’offrait une fenêtre ouverte sur un monde que je n’avais jamais imaginé. Je me trouvais plongé dans une réalité diamétralement opposée à celle que je connaissais, mais dont la noblesse et la magnificence m’éblouissaient. La rencontre avec la princesse du pays ouvrait une porte vers une culture et une civilisation dont j’ignorais tout, mais dont la splendeur m’inspirait un respect sans égal.
Dans le regard de la princesse, je pouvais déceler une force tranquille, le poids des responsabilités qui reposaient sur ses épaules royales. Et pourtant, derrière cette majesté, je discernais aussi une humaine, une âme bienveillante qui aspirait à faire le bien pour son peuple.
Cependant, les mesures qu’elle envisageait de prendre n’étaient pas la meilleure solution, et elle en était inconsciente à ce moment-là. Bien que la situation politique du pays soit défavorable, il n’était pas justifié d’adopter l’approche qu’elle avait préconisée. Je me devais de lui en faire part. À ce moment précis, nul ne possédait la connaissance de ses intentions. Seul moi entretenais des soupçons à leur égard, car l’idée en question était irrésistiblement séduisante.
̶ Il serait préférable, Votre Majesté, que vous n’envisagiez même pas cette possibilité.
̶ Pardon ?
̶ Je saisis parfaitement la situation délicate dans laquelle se trouve le Royaume. Néanmoins, ma seconde exigence demeure : veuillez éliminer la technologie qui a rendu mon invocation possible…
CHAPITRE 16 - CITIZEN 3e partie
̶ À QUI PENSEZ-VOUS AVOIR LE DROIT DE DONNER DES ORDRES ?!
Une réaction inattendue émana de l’une des personnes postées derrière la princesse, provoquant un sursaut général. Parmi les trois hommes en arrière-plan qui n’avaient jusqu’alors pas prononcé un mot, l’un d’entre eux décida enfin de briser le silence.
La princesse leva la main pour l’indiquer de se taire.
̶ Naoki, c’est assez, tu perds ton calme.
̶ Pardonnez-moi, votre Altesse.
̶ Je suis désolée, Alden. Mon cousin Naoki a un tempérament fougueux, mais, en fin de compte, il n’a pas tort. De quel droit me demandez-vous de supprimer la technologie qui pourrait renforcer notre puissance militaire ?
̶ Pensez-vous réellement à faire appel à d’autres personnes de mon monde pour obtenir des individus dotés de pouvoirs similaires aux miens ?
̶ Je n’étais pas au courant !
Ayame était stupéfaite par ce qu’elle entendait. Évidemment, elle n’avait pas saisi la portée de mon invocation et les implications politiques qui en découlaient. Pour moi, la raison de ma visite aujourd’hui était pourtant aussi claire que de l’eau de source.
̶ Il est normal que tu n’aies pas été informée, Ayame. Tu aurais été opposée à cela.
̶ Je le suis ! Si je pouvais revenir en arrière, je n’aurais jamais créé cette machine. Priver Alden de sa famille et de son monde d’origine était une erreur.
̶ Nous avons besoin de personnes comme lui, dotées de ces capacités, pour être en mesure de repousser les envahisseurs. Ils ont réussi à contourner notre sécurité. Notre technologie devient obsolète car elle a été restreinte. Si nous pouvions utiliser l’IA, tout pourrait changer !
̶ Mais dès que vous commencerez à travailler sur l’IA, vous déclencherez une guerre.
̶ C’est exact, Alden, vous avez bien compris. Nous ne serons pas suffisamment puissants si tous les pays décident de nous attaquer, surtout avec des méchas comme le Royaume d’Ezo. C’est pourquoi nous avons besoin de…
̶ … de chair à canon.
Ayame me lançait un regard interrogateur, comme pour me rappeler de peser mes mots avec précaution.
La princesse se levait, manifestant clairement son mécontentement. Je pouvais discerner sa détermination à utiliser cette technologie pour sauver son peuple.
Je ne suis qu’un étranger, tout comme les autres qu’elle souhaite invoquer. Donc, en fin de compte, si nous venions à périr, cela ne serait pas si grave. Cependant, ce n’est pas pour cela que je suis contre l’idée de l’invocation.
̶ Avec tout le respect qui vous est dû, je dois vous dire que vous avez totalement tort.
̶ Je comprends que vous préfériez éviter d’invoquer d’autres personnes, car cela peut être perçu comme un enlèvement, mais…
̶ J’ai dit que vous vous trompiez.
̶ Vraiment ? En quoi ?
̶ Je vous demande de ne pas faire appel à d’autres personnes, non pas pour moi-même, mais pour le bien de votre royaume et de votre monde. Mon invocation a été purement le fruit du hasard, c’est vrai. Cependant, vous avez eu de la chance dans votre invocation, car c’est moi qui ai répondu à l’appel, et non un autre habitant de ma planète.
̶ Que voulez-vous dire ?
̶ Je reconnais que cela peut sembler arrogant. Cependant, il est important de prendre en considération que vous n’avez pas une vue complète de la situation dans mon monde ni de l’état mental de ses habitants. Ils peuvent être perçus comme égoïstes, avares, méchants, impolis, et non respectueux. Les Terriens semblent souvent se concentrer sur l’acquisition de richesse et de pouvoir, et parfois ils manifestent des comportements violents. Si vous envisagez d’invoquer d’autres personnes de mon monde, il est possible qu’ils diffèrent grandement de moi. Au contraire, ils pourraient être enclins à utiliser leurs pouvoirs pour enfreindre vos lois, vivre leur vie sans devoir rendre de comptes. Avec des risques tels que le terrorisme, la corruption, et des problèmes mentaux désastreux, je vous mets en garde sur les conséquences potentiellement catastrophiques pour votre monde si vous envisagez d’utiliser cette technologie.
Les seuls individus présents dans la salle étaient attentifs à mes paroles, et je pouvais discerner de l’inquiétude dans leurs regards.
̶ Dans votre histoire, il y avait d’autres civilisations distinctes de la vôtre. Lorsque la magie a été découverte et que vous en êtes devenus les gardiens, de nombreuses nations ont cherché à vous arracher ce savoir. Les autres pays ont même déclenché des conflits pour cela. Vous les avez vaincus grâce à la magie, éradiquant complètement leurs populations. Finalement, tous les autres pays se sont effondrés, ne laissant que le vôtre dans ce monde. Êtes-vous au courant de ces événements ?
̶ Oui, je suis bien informé de l’histoire de mon monde.
̶ Ces autres civilisations étaient composées de personnes semblables à moi, différentes de vous, avec des perspectives et des motivations différentes. C’est là que la divergence entre votre monde et le mien s’est produite. Sur ma terre, vos habitants résident sur des archipels où la qualité de vie est bien meilleure que dans d’autres régions où les habitants sont souvent égocentriques, commettent des actes insensés et barbares, et manquent de culture. Je ne vais pas me répéter, mais je tiens à vous avertir que si vous poursuivez avec vos projets prévus, vous vous dirigez tout droit vers une catastrophe.
La princesse s’est rassise et a porté sa main à son front, comme si une migraine venait de surgir.
̶ Je n’avais pas envisagé cette perspective. Vous étiez vraiment la personne idéale pour ce rôle.
̶ Donc, vous pensiez que tous les habitants de ma planète étaient similaires ? C’est une vision simpliste, surtout étant donné votre propre situation, sachant qu’un royaume composé de la même espèce que la vôtre vous fait la guerre.
̶ Je comprends maintenant que c’était une vision puérile
Ayame et la princesse Kiyomi échangèrent un sourire délicat et apaisé, bien que teinté de tristesse dans leurs yeux.
̶ Je peux vous faire une proposition. Ces deux demandes étaient une façon de vous aider. Si vous les acceptez, je peux peut-être vous apporter des solutions ou vous guider vers une résolution.
̶ Quels sont vos projets exacts ? Comment puis-je vous accorder ma confiance, étant donné ce que vous m’avez révélé au sujet de votre monde ? Vous n’êtes pas attiré par la richesse et le pouvoir, n’est-ce pas ?
̶ En réalité, j’ai déjà ces éléments grâce à vous. Ce qui me tient le plus à cœur, c’est de pouvoir les utiliser de manière légitime. Pour être franc, j’ai toujours rêvé d’être invoqué dans un autre monde, comme dans les livres que je lisais. J’étais donc plutôt enthousiaste au début et inconsciemment déjà préparé à cette expérience. Mon désir profond est de vous aider et de pouvoir vivre librement, comme les habitants de cette planète.
̶ Alors, nous avons invoqué la personne la mieux qualifiée pour cela.
La princesse observait ses sujets derrière elle, inclinant la tête en signe d’approbation. Pendant ce temps, Ayame adoptait une attitude fière après les événements récents.
D’un autre côté, j’avais raison de craindre les conséquences désastreuses qu’aurait pu avoir l’invocation d’une autre personne. Cependant, il y avait une autre seule raison derrière cette préoccupation que je ne pouvais pas révéler. Cette raison est égoïste. Comme tout être humain de mon monde, je désirais être le seul à posséder cette unicité et à profiter de tous les avantages qui en découlaient. Je ne voulais pas les partager avec quiconque.
Ce monde sera le mien.
CHAPITRE 17 - SOUL
L’entretien était enfin officiellement terminé. Je pouvais enfin respirer et me débarrasser de ce langage trop formel qui m’oppressait. Je n’étais pas habitué à cette constante pression de choisir mes mots avec précaution. Le moment tardait à arriver, et il était nécessaire de raccourcir la réunion officielle. J’ai acquis une grande quantité de connaissances et j’ai pu me rapprocher un peu plus de la vie quotidienne des habitants d’ici. Ayame m’a assuré que j’avais agi de manière exceptionnelle, que j’avais été très persuasif et charismatique. Cependant, cela me laisse tout de même perplexe.
J’ai obtenu les réponses à mes questions sur l’IA, bien que je n’aie pas osé aborder le sujet du voyage dans l’espace et de leurs contraintes. Cependant, je vais me concentrer sur ce que la princesse m’a demandé en premier. Pour cela, il me faudra travailler chez Kanegawa Industries. Ayame prévoit de m’attribuer un département où je pourrai donner libre cours à toutes les idées qui me viennent à l’esprit. Je devrai également constituer une équipe de mon choix pour travailler sur des projets qui serviront l’avenir du Royaume. Elle me laisse même la liberté de choisir le nom de ce département, une décision que je prendrai une fois que je commencerai le processus de recrutement.
Nous avons beaucoup de tâches à accomplir : la signature du contrat de travail, la visite du département des méchas et de l’IA, ainsi que l’acquisition d’une arme. Selon la princesse, le gouvernement m’autorise à utiliser mes pouvoirs pour la protection du Royaume, mais pour cela, je dois recevoir une arme spéciale de la part de Kanegawa Industries. Je n’en sais pas plus à ce sujet, mais cela suscite en moi une grande excitation.
Nous avons déjeuner au restaurant en compagnie d’Ayame, retrouvant Midori qui avait réservé la même table que la veille. Cette fois, c’est moi qui ai réglé l’addition, car la récompense astronomique que j’avais reçu me permettait de vivre confortablement pour le reste de ma vie, sans avoir à surveiller mes dépenses.
L’après-midi débutait par la signature de mon contrat de travail en tant que cadre, ce qui me permettait de bénéficier d’un salaire considérablement généreux. Jamais je n’aurais imaginé gagner autant dans mon monde. Mes primes étaient directement liées aux performances de mes projets et à leurs chiffres d’affaires, ce qui était tout à fait évident.
J’avais également le privilège de conserver ma suite, qui était inclus dans mon package. Cependant, j’avais l’intention d’acheter une maison pour m’installer tranquillement. On m’a ensuite fait visiter les futurs locaux de mon département, situés en haut de la tour. L’endroit était encore vide et nécessitait des travaux, que je prévoyais de commencer dès demain.
La prochaine étape consistait à faire don de l’arme. Cette pièce en particulier était située dans les sous-sols de Kanegawa Industries, fortement sécurisée et éloignée des employés. Apparemment, il s’agissait d’armes magiques, du moins elles le devenaient une fois que vous y infusiez votre magie, les transformant en des armes destructrices. L’utilisation de la magie était un processus long et complexe, mais ils avaient trouvé un moyen de surmonter cette lenteur, créant ainsi une arme magique capable d’être rapide et précise.
Mon avantage réside dans le fait que ma magie ne nécessite ni incantations ni complexité. En fin de compte, je n’avais pas besoin d’armes. Cependant, cela te permet d’économiser ton mana et d’être plus décisif lors des combats. Elle est utilisée pour la victoire. En ce qui concerne la magie, certains préfèrent la préserver, la trouvant trop belle pour être utilisée, et ils aiment prolonger le combat pour en montrer la beauté. Je trouve cela ridicule, un combat est conçu pour être remporté. Tant qu’on peut gagner en cinq minutes, pourquoi le prolonger pendant vingt minutes.
Après avoir franchi toutes les portes de sécurité, Ayame, Midori et moi-même nous sommes retrouvés dans une salle entièrement blanche, où les murs étaient ornés d’une variété d’armes. Il y avait de tout : des armes archaïques, futuristes, et même fantaisistes. Vous pouviez trouver ici tout ce que vous pouviez imaginer en matière d’armement.
̶ Bien. C’est à toi de choisir Alden.
̶ Je peux choisir n’importe quoi ?
̶ J’aimerais pouvoir répondre par l’affirmative, mais la situation n’est pas aussi simple. Le choix d’une arme magique dépend de ton élément magique. En diffusant ton mana dans la pièce, tu pourras révéler les couleurs des armes qui sont actuellement neutres, comme tu peux le constater. Une fois que la magie aura été diffusée, celles qui seront colorées te seront attribuées, et c’est à ce moment-là que tu pourras faire ton choix.
J’avais l’impression d’être confronté à une sorte de dilemme de classe, similaire à ce que l’on trouve dans les jeux vidéo. Je ne pouvais pas simplement opter pour l’arme la plus puissante dès le départ, il fallait que je passe par une phase intermédiaire, ce qui était tout à fait logique.
Cependant, le principal inconvénient de cette approche était que je ne pouvais pas identifier mon élément préféré, car j’étais capable de tous les utiliser. J’ai donc commencé à libérer mon mana, une compétence que je maîtrisais désormais grâce à la Déesse.
Néanmoins, il n’y avait aucune manifestation apparente d’effet.
̶ Alden, es-tu certain d’avoir correctement canalisé ton mana ?
̶ Oui, madame la présidente, j’en suis sûr.
̶ Si tu le souhaites, je peux te montrer comment le faire avec ta Source.
Midori proposa gentiment de m’aider. Cependant, elle ne savait pas encore que je maîtrisais déjà l’utilisation du mana.
̶ C’est très aimable à toi, mais je pense que c’est peut-être parce que je ne connais pas encore bien mon élément
̶ Oui, c’est une possibilité tout à fait plausible.
En toute discrétion, je répétais la même action, cette fois-ci avec ma Source. Soudain, une seule arme s’est activée, arborant une teinte cuivrée peu attrayante. Il s’agissait d’une sorte de dague en très mauvais état, dont la lame était émoussée. Ce n’était certainement pas un objet que quiconque aurait désiré.
̶ Donc, si je comprends bien, avec toutes tes compétences, c’est cette arme maudite qui s’est réveillée ?
Ayame était en colère, non pas contre moi, mais contre le mystère qui enveloppait la magie et le résultat de ce test.
̶ Maudite ?
̶ Cette arme est véritablement maudite. Nous n’avons jamais réussi à la détruire, et elle finit toujours par réapparaître ici, peu importe où nous l’avons cachée. La malédiction réside dans le fait que quiconque tente de la prendre est englouti par les ténèbres et tombe dans un coma qui dure plusieurs semaines. De plus, ils subissent une perte significative de leurs capacités magiques.
Il est vrai qu’elle semble être dangereuse. Ça éveille ma curiosité.
̶ Comment est-elle arrivée là ?
̶ Il y a des décennies, nous l’avons exhumée lors d’une fouille archéologique dans un ancien cimetière. Depuis ce moment-là, nous avons cessé de faire des fouilles dans les sépultures.
L’anecdote était amusante, malgré les conséquences qu’elle avait entraînées. Cependant, je me disais que c’était normal si vous fouillez des tombes.
Cela ne m’empêchait pas d’être tenté. Si elle s’était révélée avec ma propre source, cela signifiait que j’avais une sorte de compatibilité avec elle.
Je m’approchais d’elle et tendais la main en sa direction.
̶ ALDEN, NOOON !
Ayame et Midori criaient pour essayer de m’arrêter, mais l’arme émana une aura sombre et ténébreuse qui m’enveloppa. Des voix résonnaient tout autour de moi.
“Il n’y a pas de contrôle sur moi, je vais tous vous tuer“, entendais-je en murmure.
Mon esprit restait lucide, et je regardais autour de moi. Une brume tourbillonnante m’entourait, que je parvins à dissiper en relâchant ma Source. Le tourbillon avait disparu, et je pouvais voir Ayame et Midori choqués de constater que j’allais bien.
Dans ma main, la dague était apparue, dans un état éblouissant et magnifique. Elle était revenue à son état d’origine, avec des finitions parfaites et indescriptibles. Chaque détail était impeccable, et son aura semblait divine.
̶ FILS DE PUTE ! C’EST TOI QUI M’A MANIPULÉ !
̶ Fils de quoi ?
̶ Hein ? Tu vas bien Alden ?
̶ Vous avez dit quelque chose Midori, Ayame ?
̶ Non, rien du tout.
̶ C’EST MOI QUI TE PARLE CONNARD, TU ME TIENS MAL DANS TA MAIN, SAIS-TU QUI JE SUIS ?
C’était la dague qui établissait une communication avec moi, utilisant un langage grossier que je ne m’attendais pas à entendre d’un objet inanimé. Je me demandais comment je pourrais affronter quelqu’un d’aussi insultant. Je levais la dague et l’observais de plus près.
̶ C’est qui le fils de pute entre nous deux ? Celui qui est enfermé dans cette putain de dague ou est-ce moi qui te tiens en laisse, comme un chien ?
CHAPITRE 18 - KENYAMI
Plus aucun son. Ayame et Midori étaient profondément choquées par mes paroles. Il était compréhensible qu’elles ne comprennent pas à qui je m’adressais, les voyant me parler à une dague. À leurs yeux, je semblais avoir perdu la tête. La dague ne réagissait pas, même après que je l’avais insultée et maltraitée à mon tour.
Peut-être était-elle contrariée ? Elle semblait aimer proférer des insultes, mais peut-être n’appréciait-elle pas d’en être la cible ?
̶ SALE PETIT CON ! COMMENT PEUX-TU AVOIR L’AUDACE DE T’ADRESSER AINSI A L’EMISSAIRE DU DIEU IZANAGI ? JE VAIS M’OCCUPER DE TON CAS RAPIDEMENT.
̶ Izanagi, cette merde qui ne peut même pas percevoir les individus d’autres mondes être invoqués dans le sien ?
̶ QUOI ? JE NE TE PERMETS PAS DE PARLER DU SEIGNEUR COMME- Attend quoi ? Invoquer ?
̶ Même toi, tu n’es pas au courant.
̶ L’idée n’a jamais été d’invoquer qui que ce soit, mais ta présence, il est clair que tu ne proviens pas de ce monde, enfoiré.
̶ Tu pourrais arrêter ces propos offensants, sinon je vais être obligé de réagir. On dirait que je suis de retour en France.
̶ Je ne comprends rien à ce que tu dis.
̶ Nous sommes deux, qui es-tu ? Une âme emprisonnée dans une dague ?
̶ Je suis Kenyami, une arme conçue pour le Dieu Izanagi lui-même. Cependant, je n’ai jamais été offerte, car mon créateur est décédé avant cela. On m’a donc enfermée dans sa tombe avec lui il y a des milliers d’années. Le premier salaud à me posséder, c’est donc toi. Et toi, qui es-tu ?
̶ Je suis Alden, originaire de la planète Terre, sous la protection de la déesse Tellus. Ces deux femmes avec moi, m’ont invoqué dans ce monde.
̶ Tellus, cette vieille excentrique est ta déesse ?! Hahaha, t’es vraiment dans une situation pitoyable en plus d’être moche.
̶ C’est la goutte de trop, je vais te tuer.
J’ai propulsé Kenyami avec une force extraordinaire, provoquant des vibrations dans toute la pièce. Les armes sont tombées en cascade sur le sol, comme des dominos.
̶ BON SANG ALDEN ! QU’EST-CE QUE TU FAIS ?!
Ayame était en colère, mais moi aussi, bien que nos raisons ne soient pas les mêmes.
̶ Je m’excuse, Ayame, mais cette dague m’exaspère. Elle ne cesse de m’insulter et a vraiment franchi les limites.
̶ La dague ? Est-ce à elle que tu t’adresses ?
̶ Oui, à l’intérieur, elle renferme une âme qui communique avec moi mentalement. Elle est furieuse que j’aie réussi à la maîtriser.
̶ Comment ça va, Alden ? Tu as réussi à la dompter ?
̶ Bien sûr, Midori. Tu pensais quoi ?
Je lui adressai un clin d’œil tout en me redressant, fier de ma réussite.
̶ ENFLURE ! TU TE PRENDS POUR QUI DE ME TRAITER COMME CA ?
̶ MAIS FERME-LÀ PUTAIN ! C’EST TOI QUI UTILISES UN LANGAGE IMPROPRE, ÇA FAIT REMONTER MON CÔTÉ SUDISTE ET FRANÇAIS. JE VAIS PETER UN CÂBLE.
̶ Pour moi, cela ne relève pas vraiment de la maîtrise.
Je ressentais une colère brûlante, puis de la gêne lorsque Midori me vit ainsi.
Je pris Kenyami entre mes mains.
̶ Toi, écoute-moi bien. Si tu ne te tais pas, je te ferais taire moi-même. J’utiliserais ma Source pour que tu cesses de parler et que je puisse te manipuler sans ton accord.
̶ La première fois, ce n’était que de la chance…
J’utilisais ma Source sans la moindre hésitation, et Kenyami avait métamorphosé sa forme. J’avais instantanément souhaité un ruban adhésif pour réduire au silence cette dague. J’avais réussi à la réduire au silence, à éteindre sa voix dans ma tête. Cependant, j’étais stupéfait de découvrir que mon arme s’était transformée en quelque chose de différent.
Je tenais le ruban adhésif dans mes mains, abasourdi, mais je n’étais pas le seul. Ayame et Midori avaient les yeux si écarquillés de surprise qu’on aurait dit qu’ils allaient quitter leurs orbites.
̶ Que s’est-il passé ? Ton arme magique a subi une transformation ?
̶ Je n’en suis pas certain, Madame la Présidente. J’essayais simplement de faire taire sa voix en pensant à un ruban adhésif, et il s’est métamorphosé en un rouleau de scotch.
̶ Peux-tu le ramener à son état précédent ?
Midori m’a posé cette question si naturellement, mais je ne savais pas comment j’avais fait. J’ai donc repris ma concentration et repassé les étapes de ce que j’avais fait précédemment.
J’ai canalisé ma source et l’ai dirigé vers ma main où se trouvait la dague, tout en pensant intensément à une arme qui était accrochée au mur en face de moi. Il s’agissait d’un fusil d’assaut futuriste que je trouvais très impressionnant, et j’aurais préféré l’avoir comme arme. C’est quand j’ai eu cette pensée que la dague Kenyami, qui était devenue un rouleau de scotch, s’est transformée en l’arme que j’avais imaginée.
̶ Je pense que j’ai saisi.
̶ Alden, tu as encore modifié ton arme ?!
̶ J’ai visualisé la même arme que celle accrochée au mur, Midori, et elle s’est transformée instantanément.
Midori s’avançait vers moi avec assurance, ses pas résonnant lourdement. Elle m’a attrapé par les épaules et m’a regardé d’un air très sérieux.
̶ Ce que tu tiens entre tes mains, c’est une arme mimétique…
̶ Elle imite ce que je souhaite ?
̶ Je n’arrive toujours pas à comprendre comment tu parviens toujours à saisir ce qu’on te dit. Tu ne peux pas être surpris de temps en temps ?
Midori était vexée, elle pensait que je n’allais rien comprendre à ce qu’elle disait, étant donné que j’étais dans un nouveau monde. Mais elle ne savait pas que j’avais suffisamment lu d’histoires pour comprendre que, d’une certaine manière, j’étais préparé à tout ce qui m’arrivait.
̶ OOOHH, une arme mimétique, c’est quoi ce truc ?!!!
̶ Tu ne m’auras pas Alden.
Midori tentait de faire la moue, bien que j’aie pu percevoir un léger sourire sur son visage, car ma réaction l’avait amusée.
Ayame s’approchait avec un sourire discret, trouvant la situation divertissante.
̶ Même si tu n’exprimes pas de surprise face à la nature de cette arme, il faut souligner son exceptionnalité. Elle est d’une rareté extrême, un trésor que nous n’aurions jamais imaginé posséder. Elle dépasse même la rareté ; on pourrait dire qu’elle est véritablement unique. Jusqu’à présent, nous n’en entendions parler que dans des contes et des récits, une chimère inaccessible. Grâce à toi, cette chimère devient soudainement une réalité.
Mes doutes quant au hasard de mon invocation étaient de plus en plus forts. Ce moment précis me le confirme encore davantage. Il est évident que ma venue n’est pas le fruit du hasard, comme Tellus le prétendait. Cela doit relever de quelque chose de bien plus vaste. La Source, ma rencontre avec Ayame : une personne d’importance dans cette société, la déesse Tellus, et maintenant Kenyami. Si tout ceci est le fruit du pur hasard, alors je suis véritablement chanceux, voire doté de la capacité « chance ».
Je tournais mon regard vers Kenyami et retransformais son apparence en une simple dague. Si je suis capable de transformer cette arme magique en n’importe quelle autre arme, cela me confère un avantage considérable. Toutes les armes que j’ai pu imaginer dans mon monde, qu’elles soient réelles ou fictives, pourraient devenir réalité grâce à moi.
Des expérimentations s’imposent.
̶ Ton sourire, Alden, il est plutôt inquiétant.
̶ Midori, je pense qu’il trame quelque chose.
Midori avait saisi mes intentions. Ayame poussa un soupir, anticipant probablement que la situation n’allait pas être de tout repos pour elle.
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